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Centrafrique : 70 milliards CFA perdus chaque année dans l’importation des aliments, selon les résultats des recherches de Christian KAMAYEN.

Publié le mardi 11 septembre 2018  |  Lepotentiel Centrafricain
Christian
© Autre presse par DR
Christian KAMAYEN enseignant chercheur à l’Université de Bangui
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Bangui - Selon les résultats des recherches du Professeur Christian KAMAYEN de l’Université de Bangui, les importations alimentaires pour la seule année 2017 s’élèvent à soixante-dix milliards de francs CFA (70 000 000 000 CFA) pour le simple fait que la production alimentaire au niveau national a considérablement chuté depuis plusieurs années bien avant même que la grande crise viennent enfoncer le clou.

Pour le Professeur KAMAYEN, la République centrafricaine (RCA) ne produit pas assez pour nourrir sa population et la couverture des besoins alimentaires est loin d’être satisfaisante. Les approvisionnements alimentaires du pays sont relativement dépendants des importations. Outre les approvisionnements des grandes zones de consommation surtout Bangui, la capitale, les dynamiques d’échanges sont fortes entre les régions frontalières et les pays voisins. Les produits alimentaires et les produits pétroliers sont les deux plus importants groupes de produits importés par le pays.

Celui-ci indique que, la production végétale est dominée par les cultures vivrières, surtout le manioc qui constitue l’aliment de base des populations. La production annuelle de cette culture en 2016 est de 705 594 tonnes et concerne 40% des exploitations agricoles. Viennent ensuite l’arachide et le maïs dont les productions s’élèvent respectivement à 117 128 et 93 239 tonnes. Le sorgho, le mil, le sésame, le riz, les cultures maraîchères, l’igname, le taro, ou la banane plantain sont produits en quantités plus faibles et destinés essentiellement à l’autoconsommation. Les performances de ces différentes spéculations sont généralement médiocres.

A titre d’exemple, le Professeur KAMAYEN met en exergue le niveau de production de manioc en 2016 qui correspond à une disponibilité par tête d’habitant de l’ordre de 163 kg/an alors qu’il en résulte un déficit moyen annuel de manioc de 115 889 tonnes. Le déficit en céréales pour la même période est estimé à 195 000 tonnes.

Les résultats de ces recherches font état de ce que les palmeraies exploitées par la Centrafricaine des Palmiers (CENTRAPALM) sur une superficie de 2500 ha et les plantations de canne à sucre (1500 ha) de la Sucrerie Africaine (SUCAF-RCA) sont difficilement rentables dans les conditions actuelles de production et les tonnages obtenus, avec respectivement 2000 tonnes d’huile de palme et 10 000 tonnes de sucre en 2017. Ces produits sont très insuffisants pour satisfaire le marché intérieur dont les besoins annuels sont respectivement de l’ordre de 20 000 et 35 000 tonnes.

A en croire les données de ces recherches, la production animale est dominée par la viande de bœuf et la viande de chasse. La viande, principale source de protéines animales pour la population centrafricaine, est tirée essentiellement de la consommation bovine dont le nombre de tête de bovins au plan national est estimé à 3 950 000 en 2012 et du petit bétail à 5 933 000 caprins. Cependant l’on a totalisé dans la même année 2012 un nombre de 403 000 têtes d’ovins, 1 068 000 de têtes de porcins et 6 552 000 volailles.

Cette consommation est estimée à 30 kg/personne/an pour la capitale Bangui et 17 kg/personne/an pour les autres zones urbaines et rurales (Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, 2004). La production locale du lait et produits laitiers reste très faible et elle est surtout auto-consommée par les éleveurs peuls.

En matière de ressources halieutiques, les bassins du Chari et du Logone abritent 195 espèces de poissons et le bassin de l’Oubangui, 206 espèces. La production potentielle peut ainsi être estimée entre 20 000 et 50 000 tonnes par an, en fonction de l’ampleur des crues dans les bassins de l’Oubangui et de la Sangha. En l’absence des statistiques, il est impossible d’estimer la production de la pêche artisanale.

L’on considère, également que la pisciculture a été un échec, malgré les intentions politiques proclamées et les projets menés depuis plus de trois décennies. La production actuelle est estimée à environ 250 à 300 tonnes par an. Toutefois, Il existe, aujourd’hui, un noyau d’agro-pisciculteurs autonomes.

Aussi, les produits de cueillette (chenilles, termites, escargots, champignons, miel, feuilles, écorces et fruits sauvages) constituent une activité essentielle pour de nombreux ruraux et jouent un rôle important dans l’alimentation de population. Le volume de ces produits forestiers non ligneux n’est pas connu.Selon KAMAYEN, la vulnérabilité alimentaire de la RCA est présentement aggravée par la crise sécuritaire généralisée et l’augmentation des prix de denrées alimentaires de base.

La faiblessedupouvoird’achat de la majorité des centrafricains, les oblige à adopter des stratégies de survie, révélateurs d’une insécurité alimentaire grave. La majorité de nos compatriotes se contentent d’un repas par jour, composé de la boule de manioc et de quelques légumes avec de l’huile ou de l’eau pour les plus pauvres. C’est inadmissible ! S’exclame le Professeur KAMAYEN qui ajoute que les pratiques alimentaires des ménages centrafricains restent tributaires du contexte socio-économique et agro-pastoral national.

En effet, et selon le Professeur KAMAYEN, les résultats de l’analyse de la situation d’insécurité alimentaire de la RCA en février 2017 (FAO) estiment que 30% de la population, soient 1 345 000 personnes sont en phases de crise et d’urgence alimentaire (phases 3 et 4 de l’IPC). Ce nombre reste très élevé malgré l’assistance humanitaire.

Concernant l’aspect de la transformation et la conservation des denrées alimentaires, il ressort que les producteurs sont restés artisanales car, au niveau national, très peu d’entreprises sont spécialisées dans le domaine du conditionnement. D’une manière générale, l’environnement immédiat des denrées alimentaires (surtout les produits maraichers) est insalubre ; ce qui expose les consommateurs aux principales maladies du péril fécal et hydrique.

Selon le Professeur KAMAYEN. il convient de souligner que pour les céréales, en dehors de la lourde chute de 2014, la reprise a été rapide pour dépasser le 12,813 milliards en 2015. Avec les perturbations de l’approvisionnement en produits carnés d’origine locale, les importations de viandes ont connu une forte croissance passant de 66 millions de francs en 2014 à plus d’un milliard en 2015. Le même niveau de hausse a été constaté sur le commerce des produits halieutiques qui ont atteint 3,882 milliards contre 200 millions en 2014 et une moyenne de 1,465 milliards entre 2010 et 2013. Les laits et produits laitiers de 3 millions en 2014 à plus d’un milliard en 2015, les graisses et huiles de 246 millions en 2014 à 2,311 milliards en 2015 et les sucres à 1,682 milliards en 2015.

Ceci étant et selon le Professeur KAMAYEN, « Nous importons beaucoup pour un pays pauvre et potentiellement riche. Il faut obligatoirement augmenter la production alimentaire pour nourrir le peuple qui meurt de faim. L’armée de garnison ne pourra se pérenniser que si elle est en mesure de produire pour sa propre consommation et les habitants environnants. Nous devons produire plus pour limiter les importations sinon disparaître quel que soit nos beaux discours ».

Bienvenu ANDALL
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