Cinq ans après le début du conflit en République centrafricaine (RCA), la vie des enfants est devenue plus difficile et dangereuse pour les enfants du pays où sévissent les groupes armés.
Dans un nouveau rapport rendu public vendredi à Genève, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) note qu’ 1,5 million d’enfants centrafricains - deux enfants sur trois - ont aujourd’hui besoin d’assistance humanitaire soit 300.000 de plus qu’en 2016.
Et les perspectives ne sont pas rassurantes. Plus de 43.000 enfants de moins de cinq ans devraient être confrontés à un risque extrêmement élevé de décès en 2019 en raison d’une malnutrition aiguë sévère (MAS)
La situation est plus inquiétante parmi les déplacés internes. Les taux de MAS étaient supérieurs aux seuils d’urgence dans 16 des 18 sites de déplacement dans lesquels des enquêtes ont été menées au cours des deux dernières années. « Pour les enfants forcés de vivre dans la brousse, les conditions sont encore plus difficiles », fait remarquer l’agence onusienne dans son rapport.
« Cette crise a lieu dans l’un des pays les plus pauvres et les moins avancés du monde, et l’un des plus dangereux pour le personnel humanitaire », a déclaré Christine Muhigana, représentante de l’UNICEF en RCA. « La situation des enfants est désespérée ».
En Centrafrique, la crise se déroule dans un contexte d’urgence aiguë en matière de développement, souligne le Fonds. Le pays a le deuxième taux de mortalité néonatale et maternelle le plus élevé du monde. Moins de trois enfants sur cinq vont à l’école primaire et près de la moitié de la population n’a pas accès à l’eau potable. La RCA se classe à l’avant-dernier rang (188e sur 189 pays) selon l’Indice de développement humain de l’ONU, un indicateur composite mesurant l’espérance de vie, le revenu et l’éducation.
Une quinzaine de groupes armés pour le contrôle de terres riches en diamants, or et uranium
La crise en RCA est largement alimentée par les combats opposant une quinzaine de groupes armés pour le contrôle des routes de transhumance du bétail et des terres riches en diamants, or et uranium.
Le plus souvent, les groupes armés ciblent les civils plutôt qu de se combattre directement les uns les autres. Ils attaquent les centres de santé, les écoles et leur personnel, les mosquées et les églises, ainsi que les sites où les personnes déplacées ont trouvé refuge.
Conséquences de ces activités : des milliers d’enfants sont piégés au sein de groupes armés et victimes de violences sexuelles. « Pratiquement tous les enfants ont besoin d’être protégés contre les groupes armés qui contrôlent désormais les quatre cinquièmes du pays », souligne l’UNICEF.
En RCA, le Fonds poursuit son objectif d’aider les enfants qui ont été libérés des groupes armés ou victimes de violences sexuelles à se rétablir et à se réinsérer dans la communauté.
Des milliers de familles centrafricaines terrifiées par les affrontements et les attaques ont chassées de chez elles. Fin septembre, près de 643.000 personnes - dont au moins la moitié sont des enfants - étaient déplacées en RCA et plus de 573.000 avaient cherché refuge dans les pays voisins. « Un enfant sur quatre est soit déplacé, soit réfugié », a ajouté Mme Muhigana.
Le nombre d’attaques contre les travailleurs humanitaires a plus que quadruplé
L’insécurité en RCA n’épargne pas les organismes d’aide. Le nombre d’attaques contre les travailleurs humanitaires a plus que quadruplé en un an, passant de 67 incidents en 2017 à 294 au cours des huit premiers mois et demi de 2018 seulement.
« En 2017, la Centrafrique était le quatrième pays le plus dangereux pour les humanitaires, après le Soudan du Sud, la Syrie et l’Afghanistan », a déclaré Marixie Mercado, auteure principale du rapport UNICEF, lors d’un point de presse jeudi à Genève.
Malgré cette insécurité, l’UNICEF s’efforce de venir en aide aux enfants qui en ont désespérément besoin, souvent dans des circonstances très dangereuses.
En plus de fournir des aliments thérapeutiques vitaux et des médicaments, l’UNICEF collabore avec des partenaires pour atteindre 890.000 femmes et enfants au travers d’actions de prévention de la malnutrition. L’agence onusienne fournit également la moitié des vaccins nécessaires dans le pays et achète l’autre moitié au nom des partenaires et du gouvernement.
L’une des réponses à la crise centrafricaine est la mise en place d’espaces temporaires d’apprentissage et de protection, de programmes d’éducation d’urgence et des fournitures récréatives, et la formation d’enseignants communautaires pour aider les enfants à retourner à l’école dans des espaces sûrs.
En dépit de l’aggravation de la crise en RCA, le financement et l’attention de la communauté internationale sont extrêmement faibles. Seulement 44% des 56,5 millions de dollars de l’appel de fonds de l’UNICEF pour la Centrafrique pour 2018 étaient financés à la fin octobre.
Pour Mme Muhigana, « les enfants de la République centrafricaine sont abandonnés depuis trop longtemps. Ils ont besoin d’attention et d’aide maintenant, et ils en auront besoin sur le long terme ».