Le débat sur le harcèlement sexuel fait rage en Gambie où les habitants son divisés sur la nécessité d’en parler pour les victimes ou pour ces dernières de se taire. Histoire de couvrir d’un voile pudique cette pratique dont seraient coupables des autorités, au premier rang desquelles l’ancien président de la République, Yaya Jammeh.
Tout est parti d’une sortie de Fatoumata Touffah Jallow, accusant depuis le Canada où elle a trouvé refuge, l’ex chef de l’Etat de l’avoir violée. Elue à l’époque Miss Gambie, la jeune fille avait eu l’audace de refuser une demande en mariage de Jammeh.
Human Rights Watch qui a encouragé la jeune fille à raconter son calvaire en a profité pour demander le rapatriement de Yaya Jammeh. Après un règne de 22 ans, l’ex dictateur s’est réfugié en Guinée-Equatoriale, après avoir contesté en vain une élection présidentielle remportée en 2016 par Adama Barrow.
Pour sa part, le Gouvernement gambien a publié un communiqué dans lequel il annonce l’ouverture d’une enquête en vue de tirer cette affaire au clair. Ainsi, le ministère de la Justice encourage les femmes ayant été victimes de viol ou de harcèlement sexuel, voire les deux, à se faire connaître pour pouvoir raconter leurs mésaventures à la police.
Enhardie par les révélations de Touffa Jallow, une autre jeune fille dénommée Sarifatou Jallow a pris son courage à deux mains pour raconter comment elle a été harcelée sexuellement par Melville Roberts, un haut responsable du ministère des Affaires extérieures, actuellement hors du pays.
« Mel et moi avons eu une rencontre il y a trois ans, alors que je n’avais que 18 ans (je viens juste d’obtenir mon diplôme d'études secondaires). Il m’avait demandé à plusieurs reprises de lui rendre visite, mais je ne l’ai jamais fait à cause du caractère de mes parents et je leur serai toujours reconnaissante de ne l’avoir jamais fait », raconte la jeune fille sur son hashtag #survivingMelville (survivre à Melvine).
Selon elle, Roberts lui en veut à mort parce qu’elle a refusé les nombreux cadeaux qu’il lui offrait ainsi qu’une demande en mariage. Sur ce dernier point, Sarifatou explique son refus par le fait qu’elle ne croyait pas à la sincérité d’une telle requête.
A la suite de Sarifatou, d’autres femmes ont révélé sur les réseaux sociaux avoir été victimes du même homme, Melville Roberts. Elles expliquent leurs témoignages par un désir de se soutenir mutuellement face à l’incrédulité et au doute de certains Gambiens au sujet de leur calvaire.
Et pour cause, le débat sur la délation sur le harcèlement sexuel s’instaure en Gambie où une bonne frange de la population souligne avoir accueilli avec beaucoup d’incrédulité les accusations portées contre Yaya Jammeh par l’ex reine de beauté, Fatoumatta Toufah Jallow.
D’autres Gambiens, notamment des hommes, sont allés plus loin en critiquant la jeune fille, semant ainsi le doute sur ses déclarations. Et sur celles de toutes les femmes ayant suivi l’exemple de Toufa Jallow.
Pour sa part, Fatou Ellika Muloshi, présentatrice à la Radiodiffusion-télévision nationale, a apporté son lot d’accusations en écrivant vertement sur son mur : « Ce gars fait croire aux filles qu’il est riche et profite de sa position sociale. Lorsque vous lui demandez de l’aide, il saisit cette occasion pour vous maltraiter et vous violer. Parlons-en les filles… #SurvivingMelville ».
Concernant ce dernier, des militantes gambiennes des droits humains mènent une campagne sur les médias sociaux pour qu’il soit démis de ses fonctions et poursuivi en justice.
Loin du débat agitant la Gambie, Melville Roberts qui séjourne au Royaum-Uni pour des études, n’a pas officiellement réagi aux accusations portées contre lui.