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Centrafrique : chinoiseries minières de bozoum: le ministre des mines Mboli-Fatrane se déculotte et refuse aussi de mourir seul (comme le député Jean-Michel Mandaba) 

Publié le mardi 30 juillet 2019  |  le Tsunami.net
Léopold
© Autre presse par DR
Léopold MBOLI- FATRAN , ministre des Mines et de la Géologie
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Honte et désolation ont envahi tous ceux qui étaient là présents à la conférence de presse « sélective » du ministre centrafricain des Mines et de la géologie, Léopold Mboli-Fatrane, ce samedi 27 juillet 2019. On avait l’impression d’être en face d’un animal traqué jusqu’à son dernier retranchement, qui se « démerdait » pour se sauver, au point de s’accrocher à n’importe quoi, d’oublier même que de part ses fonctions il incarnait la dignité républicaine et qu’il était bon qu’il meure arme en main que désarmé ou en traître. La rencontre initialement prévue à 9h a été reportée deux fois: à 12h, puis 14h. Visiblement, quelque chose n’allait pas, on le sentait déjà. Y avait-il des pressions sur le ministre de ne pas se confier à la presse? Ne devait-il pas dire certaines vérités qu’il se préparerait à livrer à la presse? Telles sont les questions qui trottaient dans l’esprit des journalistes et professionnels des médias invités mais dont certains ont été floués. En effet et chose grave, les organes de presse invités ont été chassés de la salle; seuls les médias d’Etat et deux journaux privés dont les dirigeants appartiendraient à la région du membre du gouvernement ont été introduits au lieu saint de la conférence de presse transformée pratiquement en monologue, preuve s’il en est encre besoin de l’opacité qui a toujours caractérisé la gestion des affaires publiques au niveau de ce ministère et ailleurs. Mais les comptes-rendus faits entre les professionnels ont permis de comprendre l’essentiel de la communication ministérielle que nous restituons ici tout en commentant.
1-LE COUP DE MASSUE PARLEMENTAIRE
A la vérité, ce qui a poussé le membre du gouvernement à réagir est le Rapport de mission de la Commission d’enquête parlementaire, effectuée dans les localités de Bozoum-Bossangoa-Ouham Bac du 06 au 10 juin 2019, et dont le compte-rendu a été fait aux députés réunis le 30 juin 2019. Le rapport (établi le 25 juin 2019) a été publié dans les médias de la place, et les commentaires qui ont suivi, particulièrement accablants pour le membre du gouvernement, des députés et autres cadres du ministère des Mines et de la géologie, ne pouvait rendre le ministre Mboli-Fatrane insensible.
Les points saillants du Rapport de mission qui sont particulièrement accablants pour le ministère des Mines et de la géologie sont les suivants:
CONSTATS ET CONCLUSIONS ACCABLANTS
-l’absence quasi-totale des fonctionnaires du ministère des Mines, car il y aurait seulement trois (03) ingénieurs géologues stagiaires pour la supervision des 16 sites en activité. (Pourquoi le ministre Mboli-Fatrane a préféré envoyer des stagiaires inexpérimentés et non fonctionnaires sur les sites, refusant d’affecter des techniciens fonctionnaires de l’Etat auprès des Chinois sur leurs sites?);
-un des sites de Bozoum est exploité sans autorisation (permis) d’exploitation; cela a pour conséquence l’absence d’un cahier de charges pouvant permettre à la population de bénéficier des retombées de cette exploitation;
-pour les communes disposant de cahiers de charge, l’élaboration n’a pas été contradictoire et les bénéficiaires n’ont pas connaissance de leurs contenus;
-l’utilisation de produits chimiques dans le processus d’exploitation de l’or notamment le mercure a été signalée;
-la déforestation et la désertification résultant de l’abattage massif des arbres est à craindre;
-la pêche devenue presque impossible du fait de la pollution de l’eau;
-existence présumée d’une unité de transformation de l’or en lingot à l’insu des autorités, donc sans leur contrôle;
-exploitations minières non bénéfiques et périlleuses pour la population, l’environnement et les ressources aquatiques;
-seul le Permis d’exploitation artisanale semi-mécanisée a été délivré aux quatre sociétés qui n’ont par ailleurs pas de permis de recherche;
-l’utilisation présumée du mercure dans l’exploitation de l’or; (NB: un prélèvement d’eau a été fait pour être examiné au Laboratoire Lavoisier de l’Université de Bangui);
-sur chaque site il y a environ 3 engins de chantier qui travaillent. A ce jour, il y aurait 13 sites aux dires de la partie chinoise, mais 16 selon les informateurs;
-une dizaine d’employés dont la quasi-totalité sont des étrangers notamment les Chinois et les Camerounais sont des machinistes, les quelques employés Centrafricains ne sont que des tâcherons rémunérés au quotidien;
-un cahier d’exploitation faisant état de la production journalière a été présenté à la délégation. Il ressort que l’exploitation moyenne est d’environ 400 grammes à 1 kg par site et par mois. Cette situation semble inacceptable au regard des dépenses en termes de coût de production journalière;
•le fleuve est dévié de son lit naturel, créant en certains lieux des inondations;
•des cas d’abattage d’arbres pour accéder au site;
•les marigots et ruisseaux endommagés pour faciliter la circulation des engins;
•le lit du fleuve érigé en montagne de gravier;
•le bradage des ressources nautiques;
•la pollution de l’eau;
-le développement des démangeaisons surtout vaginales chez les femmes;
-des cas d’avortement sont signalés et en augmentation depuis la pollution du fleuve;
-les difficultés de la population d’accéder à de l’eau saine pour la consommation, en l’absence de forages et de fontaines publiques à Bozoum;
-la disparition/fuite des espèces aquatiques;
-la rareté d’approvisionnement en poisson frais;
-la multiplication des cas de décès dans les villages de pêcheurs;
-un sentiment de colère au sein de la population pouvant tourner à l’insurrection populaire contre le personnel des sociétés minières, les députés locaux, les autorités locales et les fonctionnaires du secteur minier tous accusés par la population de complicité et de corruption.
•l’exploitation de l’or par les 4 sociétés minières implantées à Bozoum n’est pas rentable pour l’Etat; elle est plutôt préjudiciable pour la population et l’environnement;
•bradage apparent de nos ressources avec la complicité de certains responsables du ministère des Mines;
•utilisation des soldats FACA (en nombre impressionnant) déployés pour sécuriser les sites contrôle la population civile sur qui ils exercent des violences, alors que le peuple réclame son armée;
•disparition programmée des espèces protégées et des ressources aquatiques;
•menaces sur la santé de la population qui, à défaut du mieux, continue d’utiliser l’eau du fleuve pollué;
•exploitation industrielle (et non artisanale) de l’or à Bozoum en raison de l’utilisation de gros engins en grand nombre;
•aucun des permis attribués à ces sociétés n’a reçu au préalable l’autorisation de l’Assemblée nationale conformément à l’Art.60 de la Constitution;
(cf. Rapport de mission de la Commission d’enquête parlementaire du 25 juin 2019)
2-LE PONCE-PILATISME BANCAL DU DIEU FATRANE
« Monsieur le ministre, que répondez-vous à ceux qui vous accusent d’avoir perçu aussi le pot-de-vin chinois pour l’exploitation minière à Bozoum?», demande un journaliste. Le membre du gouvernement tente de banaliser la question avant de répondre, comme un comédien: «Des pures supputations et affabulations sont racontées. On parle de 12 millions de FCFA, d’autres versions racontent que le montant est de 46 millions… Toutes ces informations ne sont que des allégations», affirme-t-il. Avant de lâcher, d’un ton grave, l’information d’une «facture reçue de 12 millions sur 24 versés à la banque de Bouar et gérés par les deux suppléants de Bozoum 1 et 2» (sic). Une manière de dire que ce sont les suppléants des députés de Bozoum 1 Corneille Sérékoïsset, et de Bozoum 2 Ambroise Zawa, qui auraient déjà reçu la moitié des 24 millions de corruption. Sinon, qu’ont-ils mérité pour avoir les 12 millions FCFA si ce n’est en contrepartie de leur silence et leur soutien aux activités des sociétés minières auprès de la population de Bozoum?
Si déjà de simples suppléants de députés ont eu 24 millions de FCFA, combien les députés titulaires de Bozoum 1 et 2, ceux de la Commission Production et Ressources, et le membre du gouvernement peuvent-ils avoir chacun individuellement?
Sieur Mboli-Fatrane, en tant que seule et unique autorité habilitée à signer le permis de recherche et d’exploitation, pouvait-il percevoir un montant inférieur à celui des suppléants et des députés?
Et lorsque le chef du département des Mines répond aux journalistes que «l’exploitation minière de Bozoum est mécanique et artisanale; nous avons respecté et appliqué le code d’exploitation minière en son article 116», on a envie de sourire mais cela énerve. Une exploitation semi-artisanale ou mécanique et artisanale se fait-elle avec des engins lourds? Répondre par l’affirmative, c’est prendre les Centrafricains pour des demeurés ou des « canards sauvages » (sic).
Qu’un membre du gouvernement confirme la corruption des personnes non qualifiées dans une affaire de délivrance de permis de recherche et d’exploitation minière, sans reconnaître que lui-même, en tant que seule autorité politico-administrative qualifiée pour délivrer les permis, a reçu sa part, voilà qui relève d’un angélisme pernicieux. Saint Léopold le Dieu de Fatrane a raté l’occasion de se taire.
En parlant des autres qui seraient corrompus dans cette affaire sans dire ni reconnaître qu’il a lui aussi reçu quelque chose, le membre du gouvernement est tombé trop bas. Et même s’il déclarait avoir reçu quelque chose de la PDG chinoise de Bozoum, qu’est-ce qui va lui arriver? Rien, si tant est qu’il a bénéficié d’une libéralité. Les libéralités existent partout dans le monde: en Afrique du sud, en Albanie, en Algérie, et même aux en Belgique, en Chine, aux Etats-Unis d’Amérique, en France, en Grande-Bretagne, voire dans les grandes firmes et organisations internationales comme la Banque mondiale, le FMI, TotalElf, Texaco, la BAD, Orange, Ford, Toyota, Peugeot, etc.
Le problème du ministre Mboli-Fatrane est que s’il déclare avoir reçu quelque chose, c’est que l’ancien Premier ministre Sarandji et le président Touadéra auxquels il est très attaché devaient eux aussi recevoir quelque chose, comme le faisait Ndoutingaï au temps de Bozizé.
Même s’il ne le dit pas, tout Bangui en parle et ceux qui connaissent les arcanes du monde des affaires se moquent de ce membre du gouvernement qui cite les noms d’autres personnes dans une affaire de corruption dans un département reconnu partout dans le monde comme l’un des plus corrompus.
3-CE QU’UN CHINOIS NE FAIT JAMAIS CHEZ LUI ET N’ACCEPTERA JAMAIS QU’UN ÉTRANGER FASSE DANS SON PAYS
Les Chinois ont une tradition et une culture millénaire de respect et de protection de l’environnement, de l’eau et des ressources aquatiques. Le Chinois qui veut construire un pont, une route, un chemin de fer, une cité, un bâtiment, commence d’abord par faire l’étude de faisabilité pour que le projet ou le chantier ne pollue pas une rivière, un cours d’eau, la respiration de la population, etc., ni ne détruise la forêt qui donne de l’air pur et qui est le cadre de vie des espèces fauniques et végétales protégées.
Dans toutes les villes chinoises, des véhicules spécialisés et des agents municipaux et/ou provinciaux circulent toutes les 10 ou 30 mn, selon la taille et l’importance des villes, pour vérifier l’état de l’environnement et enlever ou faire disparaître systématiquement la moindre feuille d’un arbre qui tombe sur la route, la moindre goutte d’eau ou liquide qui tâche la voie publique.
Les Chinois ne jettent pas des plastiques, des mouchoirs, des détritus et nylons en désordre. Ils les jettent dans des poubelles ou des bacs à ordures publics ou privés, qui seront récupérés par des agents des services de nettoyage ou de collecte des municipalités locales pour destruction dans des sites réservés. Les Chinois ont une culture très rigoureuse de l’environnement et de la salubrité qu’ils n’acceptent jamais que des étrangers salissent leurs hôtels, les boutiques, les bus, trains et taxis…
Aucun Chinois n’accepte qu’en Chine, des sociétés appartenant à des Chinois ou à des étrangers en arrivent à ce qu’on dit de Bozoum. En moins d’une semaine, les travaux d’exploitation desdites sociétés seraient immédiatement arrêtés, et les auteurs et complices de ce crime écologique traduits en justice selon la procédure d’urgence pour être jugés, condamnés et envoyés en prison.
Ce que les Chinois ne peuvent pas faire dans leur propre pays, ils ne peuvent pas le faire à l’étranger.
4-MBOLI-FATRANE, RESPONSABLE ET SANS EXCUSE
C’est dire que ce qui s’est passé à Bozoum n’est que le reflet du comportement des dirigeants centrafricains qui sont capables de tuer les populations pour leurs intérêts égoïstes. On le voit à travers le comportement des ministres, des députés et des cadres de l’Administration. Le ministre des Mines Mboli-Fatrane reconnaît n’avoir signé que des permis d’exploitation artisanale semi-mécanisée à des sociétés minières de droit étranger. Mais que dit-il des engins lourds utilisés pour les travaux d’exploitation minière à Bozoum? La qualité et la quantité de ses engins lourds qui sont de gros moyens ne disent-ils pas qu’il s’agit plutôt d’une exploitation industrielle? Le ministre n’était-il pas au courant que ces sociétés ont utilisé des moyens d’exploitation qui vont au-delà du niveau de l’exploitation autorisé? N’a-t-il pas failli dans son obligation de contrôle de la nature et de la qualité des machines requises pour l’exploitation artisanale?
La confiance n’exclue pas la méfiance et le contrôle, dit un adage. Et à un tel niveau de responsabilité, le ministre et ses cadres ont manqué à leurs devoirs et responsabilités de:
-veiller au strict respect des cahiers de charge des entreprises d’exploitation;
-protéger la population contre tout ce qui pourrait compromettre sa santé et sa vie;
-protéger les intérêts de l’Etat et de la communauté locale;
-prendre des mesures qui s’imposent pour que les intérêts de l’Etat et de la population ne soient pas hypothéqués.
Aucun Chinois ne peut mettre en danger la santé et la vie de ses compatriotes de cette manière pour les beaux yeux ou les intérêts de l’étranger. Même si nous sommes pauvres, apprenons aux investisseurs étrangers à nous respecter, à respecter nos populations, nos forêts, nos eaux, nos poissons et les autres richesses derrière lesquels ils courent.
Si le ministre et ses cadres n’étaient pas corrompus, la situation n’allait pas devenir si dramatique et révoltante. Car Mboli-Fatrane ne manquera pas de bégayer ni d’être coincé par les questions liées à la moralité et à la légalité des documents administratifs qu’il a signés, à son manque de contrôle (synonyme de laisser-aller) de la qualité et la quantité des engins utilisés pour les travaux d’exploitation propres à des industries minières, à la catastrophe environnementale et sanitaire résultant des activités minières, au manque à gagner pour l’Etat, etc.
Maintenant que c’est le peuple à travers ses représentants à l’Assemblée nationale qui a l’affaire en main, les membres du gouvernement et leurs cadres des départements ministériels doivent être démis de leurs fonctions et traduits devant la Justice pour répondre de leurs actes.
On le voit, comme Jean-Michel Mandaba, le ministre-sultan Mboli-Fatrane refuse de mourir seul. Mais il risque d’être le seul à faire les frais de sa gestion non orthodoxe de l’affaire Bozoum qui a entraîné des conséquences graves sur la population qui ne demande que sa tête. Et les députés ont de bonnes raisons pour inquiéter le Premier ministre Firmin Ngrébada qui avait donné des réponses mensongères à leurs préoccupations en mai dernier, surtout lorsqu’il s’était permis de salir le prêtre catholique qui alertait sur la catastrophe écologique, sociale, humaine et environnementale des activités minières de Bozoum. Dans cette affaire de Bozoum, le PM Ngrébada et son ministre des Mines doivent se faire des soucis, car leurs noms risquent d’êtres inscrits dans le registre des personnalités qui, en pensée, en parole et par action, ont causé du tort à la population qu’ils ont voulu sacrifier sur l’autel de l’égocentrisme et de la prévarication.
Affaire à suivre.
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