Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Économie
Article
Économie

Projet de loi de finances 2020 : Pourquoi les élus de la nation n’auraient pas dû l’adopter

Publié le mercredi 4 decembre 2019  |  leTsunami.net
Comment


La gestion des affaires de la cité, en général, et la gouvernance économique et financière du pays, en particulier, par le régime du président Touadéra et son clan de prédateurs, de liquidateurs de la République et des traîtres à la patrie, n’ont jamais été la hauteur des attentes réelles du bas peuple et des exigences des articles 14 et 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui fondent le droit des finances publiques sur la primauté et le contrôle démocratique de la gestion budgétaire des recettes et des dépenses publiques. Et ce, depuis leur accession au pouvoir dans le brouillard des événements et des aléas de l’histoire, le 30 mars 2016.

La règle sacrée de la reddition des comptes qui s’impose à tous les ordonnateurs tant principaux que secondaires, aux administrateurs de crédits, aux gestionnaires et aux exécutifs locaux qui relèvent des collectivités territoriales, est allègrement foulée aux pieds, avec la complicité active et avérée de la cour des comptes et des élus de la nation, à telle enseigne qu’en la méconnaissance totale du noble principe de la redevabilité, selon lequel toute autorité investie d’un pouvoir public est tenu d’en rendre compte, le contribuable centrafricain de l’est à l’ouest du sud au nord n’est pas tout simplement informé de l’usage qui a été fait de son argent, au titre des exercices budgétaires 2017, 2018 et 2019.

L’inexistence ou la non – matérialité de tout rapport administratif et de toute loi organique relatifs à ces différentes lois de finances devant viser à donner à l’emploi de la contribution publique une dimension managériale efficace et efficiente de l’utilisation des ressources ouvertes en corrélation avec les politiques publiques nationales, pour en faire un outil au service de la performance des services publics nationaux et locaux et de leur contrôle réel par les assemblées délibérantes parlementaires et locales et ce, dans l’intérêt immédiat de leurs usagers que sont aussi les citoyens – contribuables, ne peut que participer de la volonté des pouvoirs publics à tricher avec le peuple, et les accuser in fine d’actes de mal – gouvernance économique et financière manifeste.

Cela est d’autant vrai que dans tous les Etats du monde, les citoyens s’intéressent d’abord à la qualité au quotidien de l’environnement de vie que leur offrent les politiques des collectivités publiques. C’est le rapport qualité/prix, et donc la réalité des coûts derrière les politiques d’accès aux transports, à l’école, aux soins de santé primaires, à l’emploi, au pouvoir d’achat, à la sécurité, à la liberté d’aller et venir et aux droits à une vie humaine digne, non financièrement mesurables, qui est au centre de leurs préoccupations ; c’est ce que les britanniques traduisent bien par le concept « value for money ». Autrement dit, les citoyens en veulent pour leur argent, c’est – à – dire pour leur contribution publique.

Ainsi donc, le concept de gouvernance met en relief le lien étroit entre la performance d’une organisation, et tout à la fois la qualité et l’effectivité des règles de contrôle de leurs gestionnaires et d’évaluation régulière de leur gestion. C’est pourquoi la défiance des citoyens à l’égard des hommes politiques et des fonctionnaires en général est entretenue par le sentiment d’inefficacité et d’irresponsabilité qu’ils donnent faute de gouvernance suffisante, c’est – à – dire faute de gestion véritablement transparente, effectivement contrôlée et dûment évaluée.

Tel est malheureusement le cas de la République centrafricaine, depuis bientôt quatre ans, où aucune reddition des comptes n’a été faite et n’est disponible, où l’essentiel des crédits ouverts dans le cadre des lois de finances 2017, 2018 et 2019 a été plus exécuté et alloué à la réalisation des dépenses à caractère politique qu’à la satisfaction des besoins prioritaires du peuple que sont les écoles, les centres de santé et les infrastructures, et où le ministre des finances et du budget, véritable chef d’entreprises connu de tous et partenaire financier privilégié de plusieurs sociétés privées de la place, excelle « héroïquement » dans les commissions des pratiques de siphonnages des crédits de l’Etat, des relations d’affaires et d’actes avérés d’extractions frauduleuses des fonds publics, de malversations financières et de détournements.

Cette grave situation qui est celle de la mal – gouvernance économique et financière non seulement pose dans toute sa nudité la question de la démission de la Cour des Comptes qui est la juridiction compétente pour juger les comptes des comptables publics, ceux des Collectivités Territoriales ainsi que ceux des entreprises et offices publics, de sa responsabilité, mais surtout doit interpeller plus d’un centrafricain sur les raisons ayant conduit les élus de la nation à adopter le projet de la loi de finances 2020. Une interpellation qui ne peut que soulever dans la conscience collective et l’opinion nationale et internationale de sérieuses inquiétudes sur leur moralité et leur capacité réelle à jouer pleinement leur rôle de contrôle de l’action gouvernementale et à défendre les intérêts de leurs électeurs, et donc du contribuable centrafricain. Car, même s’il est connu de tout centrafricain qu’ils sont tous corrompus, il leur est difficile et sera impossible d’apporter des réponses claires au pourquoi de leur choix et de l’adoption de ce projet de loi de finances 2020.

En effet, quand on considère les dispositions des articles 14 et 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 à laquelle la République centrafricaine a souscrit, au regard des sciences de gestion, le droit des finances publiques, cette adoption ne pouvait se justifier, fort des acquis démocratiques, que par la présentation de la reddition des comptes de l’exercice budgétaire 2019 et la réalisation d’une certaine performance économique et sociale :

« Article 14 : Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.

Article 15 : La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. »

Ce qui veut dire, en terme de management, que la contribution publique doit solvabiliser une prévision de dépenses correspondants à des besoins collectifs reconnus et acceptés comme tels, et adaptée à la satisfaction entière et pleine de ces priorités. La société, c’est – à – dire les représentants des citoyens siégeant au parlement et dans les collectivités territoriales, doit être en mesure, au niveau de la reddition des comptes d’en suivre l’affectation ou l’emploi, et la gestion ou l’administration en terme de performance économique et sociale afin d’apprécier la pertinence de la prévision et d’en tirer toutes les conséquences pour le budget qui suit. C’est dans cet exercice que se trouve fonder la légitimité de tout élu et nulle par ailleurs. Or la non – production de ce précieux document depuis plus de trois ans ne leur a pas permis d’exercer dignement leurs responsabilités, et en se laissant aller à voter ces projets de lois de finances, ils ne pouvaient que contribuer efficacement à ternir leur image, leur honneur et leur dignité vis – à – vis de leurs électeurs. En retour, ils risqueront d’en payer le prix dans les urnes dans les jours à venir.

En conclusions, l’adage selon lequel « les élus n’ont de comptes à rendre qu’à leurs électeurs » rappelle opportunément non seulement que les seuls juges des gestions locales sont les citoyens, mais aussi que pour que ces derniers puissent porter un jugement sur les mandats locaux, il doit leur en être rendu compte. Et en langage familier, rendre des comptes ne signifie pas nécessairement produire une comptabilité ; c’est surtout être comptable d’une action pour autrui et lui en faire un rapport écrit ou verbal. En droit civil, rendre des comptes pour un mandataire, c’est faire un rapport d’activités au mandant de l’exécution du mandat. C’est cette conception civile de la reddition des comptes qu’a bien voulu traduire l’article 15 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Jean – Paul Naïba
Commentaires