« Ouvrir la porte de la Présidence à Michel Djotodia, est un acte de haute trahison », c’est sous cet angle-là que Jean Serge Bokassa apprécie la réception de l’ancien chef de l’Etat de la Transition, Michel Djotodia, au Palais de la Renaissance par le Président Touadera, vendredi 10 janvier à Bangui.
Position exprimée dans une interview accordée au RJDH ce mardi 14 janvier 2020.
RJDH : Jean Serge Bokassa, bonjour !
JSB : Bonjour
Michel Am-Nondroko Djotodia, vient de revenir dans son pays, après six ans d’exil, a été reçu au Palais de la Renaissance par le Président Touadera, mais ce retour il le place uniquement sous le signe de promotion de la Paix en Centrafrique.
Quelle appréciation en faites-vous ?
Ce qu’on souhaiterait en tant que fils du pays, c’est d’y voir un peu plus clair. Parce qu’aujourd’hui tout le monde peut se lever et s’auréoler d’une sorte de mission divine alors que nous savons que ceux qui viennent maintenant parler au nom de la paix, s’autoproclament comme étant une sorte d’apôtre de la paix, sont ceux-là qui ont plongé le pays dans l’état dans lequel il se trouve aujourd’hui.
La crise que nous continuons de gérer aujourd’hui est parti de là. Nous nous souvenons de ce qui s’est passé le 24 mars 2013 avec l’arrivée de la Seleka telle une horde d’esprits troublés extirpés de l’enfer pour venir troubler les centrafricains. Alors qu’on ne vienne pas comme cela et comme si rien ne s’était passé pour que la personne, sans remords, se lève et dit « je viens au nom de la paix ». Oui ! Mais êtes-vous prêts à un devoir de vérité vis-à-vis du peuple, êtes-vous prêts à accepter pour qu’on vous dise tous les torts que vous avez commis à l’endroit du peuple centrafricain, êtes-vous prêts à recevoir les femmes qui ont été violées par vos hommes, les enfants qui sont devenus aujourd’hui orphelins par vos hommes, les massacres qui ont eu cours sur toute l’étendue du territoire, êtes-vous prêts à l’assumer ? La paix, oui, mais on ne peut pas la dissocier de la justice.
Mais la paix avant la justice…
Il ne suffit pas seulement de regarder aux dividendes de la paix. Ce concept de la paix, aujourd’hui, est devenu lucratif et sur la souffrance du peuple centrafricain.
Vous voulez plus clair dans cette démarche mais dès son retour, Michel Djotodia et le Chef de l’Etat Faustin Archange Touadera ont réaffirmé leur engagement à œuvrer pour le retour de la paix dans le pays, doutez-vous de la sincérité de ces hommes dans la quête de la paix en Centrafrique ?
Ecoutez, le Chef de l’Etat n’est que dans sa droite ligne depuis toujours. A partir du moment où il nous a enfermé dans des accords scélérats avec des chefs des groupes armés que je considère plutôt comme étant des criminels qui se refusent aujourd’hui de déposer les armes, les accords de Khartoum sont la logique de tout cela. Donc que voulez-vous qu’on attende de quelqu’un comme ça. Il nous a enfermés dans des accords criminels, il reçoit Djotodia un potentiel criminel qui doit répondre de ces actes devant la justice, il est dans sa logique qui n’est pas celle de défendre le peuple centrafricain. Sa logique, c’est celle de tromper le peuple centrafricain, trahir les centrafricains au nom des intérêts malsains, privés et particuliers qui sont les siens à savoir la défense de son régime marquée par une course à l’enrichissement illicite, et donc nous ne pouvons pas faire corps aujourd’hui à cette immoralité.
Le peuple centrafricain n’est pas amnésique à ce point-là. Les centrafricains ne sont pas prêts pas d’oublier dont il a fait l’objet, dont il a été victime et dont il continue d’être victime. Le chef de l’Etat prend plaisir à nous enfermer dans des alliances contre nature. Je ne pense pas que tout ceci contribue à la paix et dans tous les cas ce n’est pas de cette manière que nous entendons faire la paix en Centrafrique.
Comment pouvez-vous comprendre que Michel Djotodia aussitôt arrivé a été reçu par le Chef de l’Etat alors que François Bozize est dans l’attente depuis d’une audience avec Faustin Archange Touadera ?
Mais parce que la vision de la paix du chef de l’Etat est sélective et orientée vers les uns éventuellement les chefs des groupes armés au détriment des autres. C’est une paix à géométrie variable come la justice de notre pays aujourd’hui. Comment pouvez-vous comprendre aujourd’hui que François Bozize qui est rentré au pays, d’ailleurs je reviens sur le fait que si cet ancien chef d’Etat s’est senti obligé de rentrer au pays comme il l’a fait, mais c’est certainement ce régime en place a voulu de faire de lui un apatride. Le régime en place n’a pas accepté que François Bozize dans son pays, ce qui déroge complètement à cette disposition constitutionnelle en son article 5 alinéa 3 qui stipule très clairement que nul ne peut être contraint à l’exil.
Au nom de la paix, Monsieur Faustin Archange Touadera se devait, même si cela ne le faisait pas plaisir, de recevoir le président Bozize qu’importe les petites considérations qu’on peut avoir les uns vis-à-vis des autres. Le fait d’ouvrir la porte de la présidence à Michel Djotodia, est un acte de haute trahison. Si la justice a de choses à reprocher à Bozize mais que cela soit fait dans la règle et, faut-il le rappeler, aussi il bénéficie de la présomption d’innocence.
La ville d’Alindao est depuis jeudi dernier théâtre des violences armées opposant les FACA et l’UPC, pourtant signataire de l’accord de paix qui totalisera bientôt un an. La sincérité des groupes armés est encore à démontrer ?
Mais l’accord n’existe que dans l’esprit de ceux qui veulent y croire. Cet accord est un acte de trahison du chef de l’Etat à l’endroit du peuple centrafricain. Je ne comprends pas et je ne m’explique pas que l’on puisse inviter un Ali Darassa autour de cette table-là. Il n’a pas sa place à ce niveau-là. Donc ce sont des préalables comme autres préalables. Il aurait été important et pertinent d’imposer que des actes de bonne foi soient posés par les groupes armés. Aujourd’hui nous sommes à notre neuvième ou dixième accord avec ces groupes armés, ils n’ont jamais désarmé, ils ne sont jamais démobilisés et la preuve c’est le théâtre de cette scène tragique qui se déroule à Alindao. Comment pouvez-vous expliquer cela ? Comment expliquez-vous qu’après une année de la signature de cet accord inique le peuple continue encore à subir ce qu’il subit. Nous gardons en mémoire de nombreux évènements qui ont suivi la signature de cet accord. Tous les principaux acteurs de la signature de cet accord ne l’ont pas respecté.
Le Mouvement Kodro Ti Mo Kozo Si que je conduis à porter haut sa contribution concernant son avis sur cet accord. Nous l’avons dénoncé depuis le début. Nous ne sommes pas partie prenante de ce dispositif mensonger qui n’a pour but que de spolier le peuple Centrafricain. C’est un acte de trahison et de parjure du chef de l’Etat Faustin Archange Touadera.