Point de vue d’un enseignant-chercheur de l’Université de Bangui sur la décision de la Cour constitutionnelle annulant le décret relatif à la création d’une Délégation générale des Grands Travaux et des Investissements stratégiques en République centrafricaine
En principe, dans un Etat policé, lorsqu’une plus haute autorité de l’Etat, en l’occurrence, Son Excellence, Monsieur le président de la République, Chef de l’Etat, appose son auguste signature au bas d’un texte juridique, de l’avis des meilleurs auteurs, ce texte est normalement réputé être un acte parfait[1]. Il en va ainsi d’un décret présidentiel, qui selon le professeur Didier Truchet, « est l’acte administratif le plus solennel »[2]. En effet, et comme le fait excellemment remarquer un spécialiste de la production des normes dans l’administration, ayant circulé d’un niveau à l’autre, c’est-à-dire du chef de Service jusqu’au chef d’un département ministériel, en passant par les Directeurs de cabinet, un projet de décret a progressivement été « poli et lissé »[3] par de nombreux technocrates et techniciens de droit, de manière à éviter toute illégalité formelle et substantielle.
Unfortunaltly, pour emprunter un mot de liaison de la langue de Shakespeare, il en va autrement au « Berceau des Bantous »[4]. Malgré l’existence des services administratifs dans ce pays et surtout, comme bon nombre de commentateurs de la vie politique centrafricaine ne cessent d’ailleurs de le regretter, en l’absence d’un Conseiller juridique auprès de Son Excellence, Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, certains décrets initiés directement au niveau de la présidence de la République ou dans les cabinets ministériels sont entachés d’illégalité : le décret[5] portant création de la Délégation générale des Grands Travaux et des Investissements stratégiques (DGGTIS), récemment censuré par la Cour constitutionnelle, en est une parfaite illustration. Bouleversés par cette décision juridictionnelle défavorable à l’Etat centrafricain, de nombreux compatriotes ne cessent de ruminer tout bas la délicate question ci-après : pourquoi des ministères techniques, tel lui du Secrétariat général du Gouvernement, par exemple, qui, sous d’autres cieux, fait office de « conseil juridique du Gouvernement »[6], ont-t-ils favorisé en amont, ainsi que tout lecteur de l’actualité centrafricaine le découvrent autant dans la presse écrite que sur les réseaux sociaux, une sorte de « revers pour le pouvoir »[7] exécutif ou encore une sorte de « victoire politique et juridique »[8] du président d’un parti politique de l’opposition démocratique sur la « plus Haute Institution »[9] de l’Etat centrafricain qu’est la présidence de la République ?
En effet, après avoir été débouté par la Cour constitutionnelle en décembre 2019 suite à sa requête en annulation d’un arrêté primo-ministériel[10], le président du Mouvement Démocratique pour la Renaissance et l’Evolution de Centrafrique (MDREC), Monsieur Joseph BENDOUNGA avait saisi à défaut, faudrait-il tout de go le faire remarquer, la Cour constitutionnelle pour vérification de la constitutionnalité d’un acte administratif unilatéral pris par Son Excellence, Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat, à savoir : le décret n°19.355 du 17 décembre 2019.... suite de l'article sur Autre presse