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Centrafrique : Quel lendemain pour les enfants centrafricains ?

Publié le mercredi 17 juin 2020  |  Le Potentiel Centrafricain
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© Autre presse par DR
Des enfants de la ville de Bamingui à l`Est du pays en attente de la distribution de la nourriture par l`ONG Première Urgence, bénéficiaire de financement des fonds de l`Union Européenne.
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Le 16 mai de chaque année, est célébrée la Journée internationale de l’enfant africain. Cette journée est décrétée par l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), devenue aujourd’hui l’Union Africaine (UA), suite aux événements tragiques ayant entraîné le massacre d’élèves et étudiants à Soweto en Afrique du Sud. Ceux-ci manifestaient pacifiquement pour réclamer des conditions idoines d’études lorsque les forces de sécurité interne les ont pris à partie, massacrant de nombreux enfants ce jour.

C’est depuis 1991, lorsque L’OUA a décidé de dédier le 16 mai de chaque année « Journée Internationale de l’Enfant Africain » qu’elle est célébrée un peu partout en Afrique. En Centrafrique, cette journée est souvent organisée autour de diverses manifestations dont les enfants sont les principaux acteurs et bénéficiaires. Malheureusement, pour cette année-ci, pandémie du coronavirus oblige, cette célébration est réduite à des manifestations virtuelles, limitant de fait l’accès de bon nombre d’enfants à ces manifestations.

Mais au-delà des traditionnelles manifestations, la pandémie du covid19 et le confinement ne sont-ils pas une occasion pour que les enfants eux-mêmes dans leurs différentes organisations, les institutions en charge du bien-être, de l’éducation et du développement de l’enfant, puissent s’assoir autour des tables et réfléchir sur ce qu’il y a de mieux à faire pour l’émancipation de l’enfant en Centrafrique ? Bien que l’avenir des enfants de Centrafrique soit une préoccupation majeure des hautes autorités du pays, moins ou peu visibles sont les actions menées en faveur de ces enfants surtout pour leur éducation et formation.

Parlant de l’éducation qui est le fondement même du devenir de l’enfant, elle est à déplorer à tous les niveaux.

Tout d’abord au niveau de la famille, première cellule pour l’acquisition des connaissances de base de l’enfant, on regrette la fuite en avant des parents et les tuteurs qui ne prennent pas assez à cœur leurs responsabilités pour une meilleure protection des enfants en leur apportant soins, nourriture, logement, vêtement et éducation, les cinq actions considérées comme capitales par feu Barthélémy Boganda, le père de la Nation Centrafricaine. Dans les ménages, combien sont les parents irresponsables qui ne pensent qu’à s’abreuver de leurs boissons fortes, laissant à la traîne ce qui est indispensable pour le bien-être de la famille et surtout des enfants ? Résultat, le phénomène des enfants de la rue se développe au galop et s’observe partout en Centrafrique.

S’agissant de l’éducation formelle matérialisée en Centrafrique par la scolarisation des enfants, quel est son état à l’heure actuelle ? La quasi absence des infrastructures scolaires, l’insuffisance des enseignants qualifiés remplacés dans la plupart des écoles par les « maîtres parents » et les vacataires dans les lycées voire même l’Université, le manque cruel de matériels didactiques adéquats, le surpeuplement des salles de classe et la grave détérioration du système éducatif en Centrafrique ont comme principale conséquence la baisse de niveau que l’on déplore à tous les degrés de l’enseignement en Centrafrique.

Dans des situations pareilles et en l’absence de réformes réfléchies, viables et efficaces du système éducatif, comment envisager un bon avenir pour le pays ? Ne va-t-on pas, à coup sûr, vers une situation où ce seront des étrangers qui viendront imposer leur pouvoir au pays ? Si on ne fait attention, la RCA risque de verser dans une situation de recolonisation dont elle ne saurait s’en débarrasser.

Bien que le système éducatif du pays est aberrant, la pandémie du covid19 et le confinement sont venus ajouter leur part de pilule pénible à avaler et qui tend à tout chambouler. Voilà près de trois mois, les classes sont restées fermées, les cours arrêtés et on ne sait même pas encore à quand la reprise des classes. Une situation si difficile au point que tous les hauts responsables de l’éducation nationale, de la santé et de l’Unicef n’arrivent plus à trouver sommeil, ne savent plus où mettre la tête et semblent poser les fesses sur de la braise enflammée tant les multiples réunions et discussions pour mettre en branle des scénarios de reprise des classes n’aboutissent qu’à des querelles stériles du fait que chacun renvoie la balle dans le camp de l’autre. Une sorte de jeu de ping-pong dont le ballon ne fait que des ricochets, c’est-à-dire, aboutir à une solution viable et réalisable.

Puisqu’il s’agit d’enfants, relevons qu’en Centrafrique, il y en a une catégorie laissée pour compte : « les enfants de la rue »; comme si la rue était en mesure de faire des enfants. La présence de ceux-ci dans les rues des villes et grandes agglomérations de la RCA est la résultante de l’irresponsabilité, nous l’avons déjà dit, de certains parents qui poussent certains enfants à aller dans la rue. Aller dans la rue ne veut nullement dire que ces enfants n’ont plus le droit de se nourrir, de se vêtir, de se soigner, de se loger et d’être éduqués. Que fait le gouvernement, l’Unicef pour cette catégorie de personnes qui ne demande et n’attende qu’à être considérées comme des humains et être pris en charge ? Certes que des ONG telle que la « Voix du Cœur » et certaines organisations caritatives religieuses tentent de s’occuper de ces enfants, mais leur nombre en constante augmentation et surtout l’absence des moyens pour sérieusement prendre en charge ces enfants sont d’infranchissables obstacles dont se plaignent ces organisations.

Soigner, c’est l’un des maîtres mots de Barthélémy Boganda. Dans la République Centrafricaine naissante, c’est-à-dire dans les années 60 à 70, l’on a vu une véritable couverture sanitaire, efficace et répandue sur l’ensemble du territoire national. Les hôpitaux soignaient gratuitement. Des équipes mobiles sillonnaient les diverses contrées pour rendre les soins accessibles aux populations éloignées des grandes agglomérations. Les épidémies diverses étaient prises en charge par des corps soignant spécialisés. L’enfant était le point de mire de toutes ces précautions visant à assurer une bonne santé à la population car une bonne santé est inséparable d’un bon et rentable travail, fondement de toute émergence et de tout développement socioéconomique.

Qu’en est-il de la santé au jour d’aujourd’hui et particulièrement celle des enfants ? La gratuité des soins de l’ancien temps a disparu de nos jours. Tout est désormais assujetti à l’argent. Le principe de « sans argent, pas de soins » est appliqué partout dans les hôpitaux et de façon stricte par ceux-là qui ont fait le serment d’Hippocrate, serment par lequel ils se sont engagés à assurer les soins aux patients sans considération de sexe, de race, de religion ou d’appartenance politique.

Même là où les soins sont censés être gratuits comme par exemple au Complexe Pédiatrique de Bangui, une haute mafia s’est instituée au point que le problème de manque d’argent devienne la cause principale du décès des enfants et non les maladies pour lesquelles ces enfants sont admis dans ce centre. Dans les autres hôpitaux, n’en parlons pas. Les médecins et autres techniciens, pourtant personnel de l’Etat et émargeant sur son budget, exigent sans vergogne de l’argent avant toutes consultations et soins. Presque tous les médecins préfèrent travailler dans leurs cliniques personnelles où ils consacrent la majorité de leur temps que dans les hôpitaux où ils sont officiellement appelés à servir.

A cela s’ajoutent les méfaits des récurrentes crises militaro-politiques qui sont à l’origine de massifs déplacements des populations. Ces populations meurtries, faute de mieux trouver comme refuge, sont souvent agglutinées dans des camps de fortune appelés « ledger » ou dans la brousse. Ces milieux ne sont naturellement pas indiqués pour une vie normale et saine. Les gens y sont exposés à tout genre de maladies et ce sont surtout les personnes du troisième âge et les enfants qui paient le lourd tribut car le taux de mortalité est particulièrement élevé parmi ces couches sociales.

S’il est vrai que les organisations caritatives posent des actes salutaires pour ces enfants, les vraies responsabilités reviennent aux parents ou tuteurs en tant que géniteurs et surtout à l’Etat en tant que garant de la protection du peuple.

@Jacques KOSSINGOU,
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