Quatre anciens premiers ministres se sont positionnés pour la présidentielle de 2020 en République Centrafricaine. Quelles sont les forces et les faiblesses de ces personnalités qui, à un moment de l’histoire de ce pays, ont participé à la gestion de la chose publique ?
Anicet Georges Dologuele (63 ans) est le chef de file de l’opposition démocratique. Son parti l’Union pour le Renouveau Centrafricain bien que créé en 2013, a réussi à s’implanter sur les 70% du territoire, ce qui lui a permis d’être 1er au Premier tour de la présidentielle de 2016, devançant des poids lourds comme Ziguele. Le président de l’URCA présente la carrure d’un chef d’Etat. Il a des réseaux surtout dans le domaine financier. Il est encore considéré comme une sérieuse menace pour le camp présidentiel qui passe son temps à l’attaquer chaque fois qu’il fait une sortie médiatique.
En 2016, l’histoire des 10% que ses adversaires lui ont collée à la peau et celle du candidat des riches, ont fait perdre les élections au second tour à ce financier. Anicet Georges Dologuele n’a pas profité du quinquennat pour réduire les effets de ces deux accusations qui seront encore invitées dans la danse lors des élections de décembre. Le président de l’URCA est moins audible aujourd’hui qu’en 2016. Il est l’un des candidats ayant très peu sillonné les villes de l’arrière-pays. Anicet Georges Dologuele est plus bureaucrate que politique.
Martin Ziguele (63 ans) est l’un des anciens premiers ministres, candidats à la présidentielle centrafricaine. Ce sera sa quatrième tentative. Il est considéré comme l’un des poids lourds actuels de la vie politique centrafricaine. Son parti le Mouvement de Libération du Peuple Centrafricain (MLPC) est présent sur toute l’étendue du territoire et constitue pour lui, une machine électorale. Ces trois dernières années, il a parcouru plusieurs villes de l’arrière-pays malgré l’insécurité, ce qui le fait passer pour une frange de la population, comme un leader touché par la situation sécuritaire, attentif au sort de ses compatriotes. Très calculateur, Martin Ziguele s’en prend aux groupes armés, très impopulaires auprès de la population pour espérer gagner l’affection populaire.
Le candidat du MLPC est l’un des politiques qui comptent de nombreux adversaires. Martin Ziguele a toujours sur la peau l’accusation de « complicité » avec la Seleka. Lors des élections de 2016, cette accusation a fortement pesé dans la balance pour le contraindre à occuper la quatrième place qui est bien au deçà des attentes du MLPC. Martin Ziguele a mis les bouchées doubles ces quatre dernières années pour laver son image mais, « la complicité » avec la Seleka sera une fois de plus au rendez-vous de décembre 2020.
Nicolas Tiangaye (64 ans) a un passé très convainquant de défenseur des droits de l’homme. Il a de nombreux réseaux tant au niveau national qu’international. Le président de la CRPS est respecté au sein de la classe politique qui sait influencer par sa teinture juridique. Avant l’avènement de la Seleka Me Nicolas Tiangaye faisait un consensus au sein de la classe politique centrafricaine qu’il connait très bien. Il est connu comme un homme de rigueur, ce qui peut jouer dans la balance si une communication pertinente est développée.
Le parti de Tiangaye sur lequel il compte, est très limité géographiquement. Très soucieux de sa personne, Tiangaye est plus juriste que politique. Très rare sur le terrain. Son grand problème est l’accusation de « complicité » avec la Seleka. Il n’a pas encore subi cette accusation dans les urnes, ce sera alors la première fois qu’il mesure l’ampleur de cette bombe qui a balayé l’espoir du MLPC en 2016. La candidature de ce professionnel de droit est plus celle de test que de victoire.
Mahamat Kamoun (59 ans) est considéré par ses soutiens comme un homme très simple et ouvert. Il est connu comme un financier très aguerri. Ce sera sa première participation à une élection présidentielle mais le président de Bêafrika Ti E Kwë (BTK), comme premier ministre de Catherine Samba Panza à l’époque des faits, aura à répondre aux attentes des uns et des autres sur le détournement du don angolais. Mahamat Kamoun est aussi présenté comme une des têtes pensantes de la Seleka. Dans certaines zones, il risque d’être « personae non grata » comme d’autres leaders cités dans le phénomène Seleka.
Les quatre premiers ministres candidats à la présidentielle du 27 décembre 2020, ont été en poste entre 1999 et 2016 avec une moyenne de 2 années dans les fonctions. Anicet Georges Dologuele, premier ministre de Patassé entre 1999 et 2001. Il a été remplacé sous le même magistère par Martin Ziguele qui a occupé ses fonctions entre 2001 et 2003. Me Nicolas Tiangaye a été premier ministre sous les magistères de Bozize et Djotodia entre 2013 et 2014. Mahamat Kamoun a occupé ces fonctions entre 2014 et 2016 avec comme chef d’Etat Mme Catherine Samba-Panza.