Elles sont issues de toutes les couches socioéconomiques centrafricaine et veulent un avenir meilleur pour les femmes en Centrafrique, mais ne savent pas toujours comment agir pour y parvenir. A l’invitation de la MINUSCA, en partenariat avec le Réseau des Femmes et filles élites pour le développement (RFFED), 120 femmes ont bénéficié d’un renforcement de capacités les 3 et 4 février 2021 à Bangui, sur le leadership politique des femmes pour la gestion des conflits post-électoraux.
Par Ghislaine ATTA
L’Assemblée nationale centrafricaine a adopté, lors de sa session ordinaire du 09 novembre 2016, la loi instituant la parité entre les hommes et les femmes. Inédite dans un contexte centrafricain où les disparités entre les hommes et les femmes dans les postes de décision au sein de l’administration publique sont profondes, cette loi, promeut « l’égalité numérique des hommes et des femmes aux mandats électoraux, aux fonctions électives et aux postes à caractère nominatif dans les secteurs publics et privés ».
Pourtant, Kahongo Deborah Gloriane est indignée : « on ne donne pas toujours la possibilité aux femmes d’être des ‘femmes capables’. On les considère comme inferieures. Pourtant les femmes ont le droit de parler librement, d’être des leaders aussi bien dans le pays que dans les quartiers ou les communautés. » Comme elle, la centaine de femmes qui a pris part aux échanges sur les notions de base du leadership a décrié les nombreuses atteintes aux droits des femmes en République centrafricaine. En période électorale particulièrement, elles ne veulent plus être des « caisses de résonnance » bonnes uniquement pour mobiliser les foules pendant la campagne ; mais participer entièrement au jeu démocratique et démontrer leurs capacités à apporter des solutions nouvelles aux problèmes de la société. « Les femmes ne veulent plus rester dans cette posture; elles aspirent à plus de responsabilités. La nécessité d’une «alternance générationnelle» chez les jeunes filles se fait de plus en plus sentir. Il existe un besoin réel de construction d’un leadership des femmes en matière électorale», a fait valoir la coordonnatrice du RFFED, Vincentie Panika.
La session qui se tient dans le cadre d’une vaste campagne de sensibilisation et d’éducation électorale lancée fin 2020, a, en outre, été l’occasion pour les participantes d’en apprendre un peu plus sur la personnalité et les valeurs d’un leader.
Sur la question de la transformation des conflits, il s’est agi de permettre aux participantes d’avoir une meilleure connaissance des techniques de prévention et de gestion de conflit, afin de contribuer durablement au maintien ou à la restauration de la cohésion sociale au sein de leurs groupes ou de leurs communautés. Les différents niveaux et étapes des conflits, les outils d’analyse et modes d’intervention sont entre autres sujets abordés sous forme d’échanges et de travaux de groupes.
Pour la RCA, actuellement en proie à des violences postélectorales, l’occasion était propice pour s’approprier les notions de cohésion sociale et paix, tolérance et pardon, ainsi que du respect de la différence et réconciliation, a indiqué l’experte et formatrice en gestion pacifique des conflits, Bertille Koba. « On pense généralement que les conflits sont de mauvaises choses. Mais s’ils sont bien gérés, ils peuvent renforcer nos relations et nous aider à aller de l’avant. Cependant, ce qui arrive trop souvent lorsque les conflits sont mal gérés, c’est la destruction des relations entre les personnes ou entre les communautés », a-t-elle par ailleurs souligné.
Les discussions sur le thème de la communication pour le changement des comportements ont permis aux femmes leaders de comprendre leur rôle en tant que vecteur de transformation. Comme l’a indiqué l’officier de l’information publique, Elisabeth Brya, représentant par ailleurs la MINUSCA, « pour qu’un individu prenne la décision de modifier ou non un comportement, il y a plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte », tels que la culture, le milieu social, l’âge, le sexe, le niveau d’instruction ou encore les croyances. D’où la nécessité d’apprendre de chaque interlocuteur afin d’adapter au mieux le message à faire passer.
C’est sur des femmes galvanisées et déterminées à transformer leurs foyers, communautés, villes et la RCA, que s’est refermée la session de renforcement des capacités. « Deux jours ne sont pas suffisants, vu la quantité de choses que nous avons apprises. Nous sollicitons des séances supplémentaires, car le sujet est capital », a, pour sa part, plaidé la participante Edwige Bangbi.
Un appel compris par la MINUSCA qui a tenu à que rappeler que son mandat lui donne le « devoir de protéger les civils, d’appuyer le processus de paix et de renforcer l’autorité de l’Etat. Cela ne peut se faire sans la participation des femmes », comme l’a indiqué Elisabeth Brya. « L’idée à l’issue de l’étape de Bangui est de constituer un noyau de femmes leaders bien outillées qui iront, à leur tour, à travers le pays transmettre le message », a-t-elle conclu.