20 janvier 2014, 20 janvier 2015 voilà une année que Catherine Samba-Panza a été portée à la magistrature suprême par les Conseillers Nationaux. C’était parce qu’elle est une femme, émanant de la société civile et l’un des responsables du DPI (Dialogue Politique Inclusif) tenu au mois de Juin 2008 à Bangui que la Chef de l’Etat, peu connue du grand monde, a dû peser lourde dans la balance aux dépens de ses challengers. Mais en une année de transition, que s’est-il passé réellement ? Gaston Mandata N’GUEREKATA dégoupille. Entretien !
La Fraternité (LF) : Initialement, la transition devrait prendre fin en Février de cette année. Mais elle vient d’être prolongée de six mois. Quel bilan faites-vous de long processus depuis Janvier 2013 avec Bozizé en passant par Djotodia pour arriver à Samba-Panza ?
Gaston Mandata N’GUEREKATA (GMN) : Bien que portée à bout de bras par la communauté internationale, la transition en Centrafrique va à vau-l’eau, contrairement à celle mise en place au Burkina Faso. En effet, le peuple burkinabè a fait preuve d’une grande maturité. Les organes de transition ont été constitués en un temps record et la date des élections présidentielles fixée au 20 Novembre 2015 soit un an après l’insurrection populaire d’Octobre dernier. Les autorités du Sud Soudan voisin ont décidé d’organiser les élections en Juillet 2015 malgré la guerre civile qui déchire le pays. En Centrafrique, les choses trainent en longueur, avec pour dénominateur commun le manque de volonté politique pour certains acteurs principaux et l’incompétence pour d’autres. En outre, nous sommes plus diligents à dérouler le tapis rouge qu’à trouver des solutions durables et efficaces à nos problèmes. Je note enfin que la Présidente gère l’Etat comme sa maison et les Finances publiques comme sa poche.
LF : Les autorités de la transition ont opté pour le dialogue à la base, mais en six mois peut-on réussir ce processus et ensuite organiser les élections ?
GMN: Le forum de Brazzaville ayant conduit aux accords de cessation des hostilités entre les belligérants s’est tenu au mois de juillet. Six mois plus tard, nous en sommes qu’au début des préparatifs du dialogue qui aurait du être organisé dans la foulée du forum de Brazzaville. Je note par ailleurs que six mois plus tard, la date de la tenue de ce dialogue n’est pas connue. Encore moins celle des élections. A ce rythme, nul n’a besoin d’être devin pour prédire ce qui se trame.
LF : Une grande trouille a frappé l’opinion nationale, en ce qui concerne la rencontre de Nairobi qui a vu la participation des anciens présidents et chefs de guerre Bozizé et Djotodia. Peu de voix se sont levées tant du côté des autorités que de la part des hommes politiques. Que savez-vous exactement de Nairobi et comment appréciez-vous cette démarche, eu égard au Forum de Brazzaville ?
GMN: Je n’ai aucune information fiable sur la rencontre de Nairobi dont vous faites allusion. Cela dit, je pense que les centrafricains ont le droit de se réunir ici ou ailleurs pour parler de leur pays, sans arrière-pensée négative.
LF : Deux avocats, c’est-à-dire hommes de droits qui étaient d’importants membres des Gouvernements des régimes de Bozizé et Djotodia, ont déclaré qu’ils feront la course à la présidentielle alors qu’on les croyait frappés par le critère d’inéligibilité. Votre appréciation sur ce quiproquo.
GMN : Il s’agit là d’une question juridique qu’il faudra tôt ou tard élucider.
LF : La tragédie de Charlie Hebdo a vu les Français démontrer le degré d’unité et solidarité. Sarkozy et Hollande sans compter les autres politiques ont fait front commun. En avez-vous été touché ? Et si l’on devrait revenir en RCA, qu’en diriez-vous ?
GMN : La liberté d’expression est une valeur fondamentale. Elle se doit d’être universelle. Il faut la défendre que l’on soit d’un bord politique ou d’un autre. Ce qui justifie d’ailleurs ce degré d’unité et de solidarité que vous évoquez. Toutefois, je pense que la situation n’est pas comparable à celle qui prévaut en Centrafrique. Des crimes de masse ont été commis. Crimes pour lesquels certains de nos hommes politiques auraient une part de responsabilité. Tant que la justice n’aura pas fait son travail, je ne vois pas comment il pourrait y avoir un front commun.
LF: Un chef de guerre Seleka a attrapé un des lieutenants de la LRA pour le remettre aux soldats américain dans la zone où sévit cette nébuleuse. Etes-vous impressionné par cette nouvelle ?
GMN: Dominique Ongwen puisque c’est de lui qu’il s’agit est un criminel. Je me réjouis qu’il soit arrêté et traduit en justice car il doit répondre de ses actes. Je souhaite qu’il en soit de même pour les autres criminels qui sont encore dans la nature.
LF : L’OCS a fait publier les résultats d’un sondage débuté au mois de décembre. Si les élections devraient se tenir maintenant, vous arriveriez selon ce résultat en deuxième position et un 2e tour devrait se tenir entre vous et Dologuélé. Vous y croyez ?
GMN: Je ne suis pas un adepte des sondages. Ce qui importe ce sont les relations de proximité que je tisse au fil du temps avec le peuple centrafricain, à Bangui, comme dans l’arrière-pays.
Décryptage : La Fraternité