En exil, l’ancien homme fort de Bangui se fait discret. Entre conversations téléphoniques avec des chefs d’État et médiations souterraines au sein de son parti politique, il reste toutefois actif. Jeune Afrique lève le voile sur la « retraite » de François Bozizé à N’Djamena.
C’est dans une villa modeste de la périphérie de N’Djamena que François Bozizé vit depuis un peu moins d’une année. Selon nos sources, il y dispose d’une équipe restreinte de cinq à six militaires centrafricains. Ils assurent la sécurité de l’ancien homme fort de Bangui depuis son retour d’exil à la !n de l’année 2019.
Des soldats tchadiens sont également positionnés autour de sa résidence. Ils sont placés sous l’autorité de l’Agence nationale de sécurité (ANS), service de renseignements dirigé par Ahmed Kogri qui gère l’exil de François Bozizé.
Tout-terrain et visiteurs
Selon nos informations, la présidence tchadienne, en liaison avec la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), a donné à l’Agence un budget pour répondre aux besoins de l’ancien chef de l’État. Deux véhicules devaient aussi être mis à sa disposition, même si François Bozizé se déplace à l’heure actuelle à bord d’un tout-terrain acheté à ses frais.
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L’ex-président reçoit peu mais il a tout de même la possibilité d’accueillir des visiteurs. Christian Guénébem, le président du Kwa Na Kwa (le KNK, son parti, dont il a quitté la direction après s’être engagé dans la Coalition des patriotes pour le changement au début de 2021), lui a notamment rendu visite en octobre, tout comme son !ls Francis, venu au moins une fois. Ce dernier vit toujours en Centrafrique – tout comme son cousin Maxime Mokom –, où il est à la tête d’éléments armés restés fidèles à son père.
Multiples contacts
Toujours selon nos informations, François Bozizé reste en contact avec les barons du KNK. Il est d’ailleurs intervenu à plusieurs reprises pour calmer les querelles internes nées de son retrait il y a un an, en particulier entre Christian Guénébem et Jean-Eudes Teya, le secrétaire général. Il s’entretient également de manière régulière avec les autres chefs de la Coalition des patriotes pour le changement.
En revanche, ses relations avec la CEEAC, et notamment avec le président angolais de sa Commission, Gilberto Da Piedade Verissimo, se sont raréfiées ces derniers mois, à mesure que l’espoir d’une médiation sous-régionale dans la crise centrafricaine s’amenuisait.
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Le discret François Bozizé a par ailleurs su garder l’oreille de certains présidents du continent. Selon nos informations, il a ainsi parlé au téléphone, entre autres, avec l’Ougandais Yoweri Museveni, dont il est proche, le Centrafricain ayant vécu plusieurs années d’exil à Kampala, non loin de la résidence de Museveni.
Avant de choisir le camp de la rébellion, et alors qu’il préparait sa candidature à la présidentielle de décembre 2020 (qui sera finalement retoquée par la Cour constitutionnelle centrafricaine), François Bozizé avait noué des alliances avec plusieurs chefs d’État (ou anciens dirigeants) africains. Selon nos sources, son parti avait ainsi obtenu le soutien du Sénégalais Macky Sall ou encore du Congolais Joseph Kabila. Celui-ci avait ainsi promis une aide financière de plusieurs millions de dollars.