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Allocution de Mme Valentine Rugwabiza représentante spéciale du secrétaire général et cheffe de la Minusca lors de la présentation du rapport du secrétaire général sur la situation en RCA au conseil de sécurité

Publié le jeudi 23 juin 2022  |  MINUSCA
Mme
© Autre presse par DR
Mme valentine rugwabiza , représentante spéciale du secrétaire général et cheffe de la minusca
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Madame le Président,

Chers membres du Conseil de sécurité, Mesdames et Messieurs,

1. Je voudrais commencer par vous exprimer, au nom du Secrétaire général des Nations Unies, ma gratitude pour l’intérêt et l’attention que ce Conseil continue d’accorder aux développements, défis et progrès relatifs à la mise en œuvre du mandat de la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation en République Centrafricaine (MINUSCA) qui nous valent la présente session.

2. Durant ces trois derniers mois que couvre le rapport soumis à votre appréciation et dès ma prise de fonction, je me suis particulièrement investie avec la MINUSCA dans le renforcement des relations de confiance avec le Gouvernement centrafricain et la remobilisation des organisations et États de la région ainsi que les partenaires internationaux pour la redynamisation du processus politique ainsi que dans le repositionnement de la Force de la MINUSCA. Il s’agit-là des trois axes stratégiques qui cristallisent les efforts de la Mission et méritent l’attention du Conseil.

Distingués membres du Conseil,

3. Il n’est point besoin de relever la léthargie de fait dans laquelle était plongé le processus politique malgré la primauté que nous y attachons tous. Cette priorité stratégique qui découle de notre mandat justifient tous les efforts de remobilisation de la région que j’ai entrepris, au courant des six semaines depuis que j’ai pris fonction, de concert avec le Gouvernement centrafricain et en étroite coopération avec l’Angola, le Rwanda, mandataires de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, l’Union Africaine et la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC). Je me réjouis que ces efforts aient culminé, sous la direction du Gouvernement de la République centrafricaine et les auspices de l’Angola et du Rwanda, avec le soutien de la MINUSCA, à la réunion de revue stratégique du processus politique qui s’est tenue le 4 juin dernier à Bangui.

4. La tenue de la réunion de revue stratégique du processus politique pourrait bien et devrait faire du 4 juin à la fois une date de référence et un tournant décisif tant elle a enregistré une participation de haut niveau avec la présence du Chef de l’État, des Ministres des Affaires étrangères de l’Angola et du Rwanda, des garants et facilitateurs de l’Accord Politique pour la Paix et la Réconciliation du 6 février 2019 et des partenaires internationaux pour une évaluation participative des progrès et défis majeurs dans la mise en œuvre de la Feuille de Route Conjointe.

5. Je me réjouis de constater avec tous les partenaires que la réunion de revue stratégique a atteint tous les objectifs qui lui avaient été assignés, notamment :

La remobilisation de la région avec la présence effective des Ministres des Affaires étrangères de l’Angola et du Rwanda mandataires de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, de la CEEAC, de l’Union Africaine.

2. L’appropriation nationale du processus politique par les Ministres compétents du Gouvernement sous la direction stratégique du Président de la République avec une délimitation des rôles et responsabilités des ministères clefs chargés d’enclencher la synergie requise pour la mise en œuvre des composantes de la Feuille de Route Conjointe qui relèvent de leurs compétences d’attribution sous la coordination effective du Premier Ministre et Chef du Gouvernement centrafricain et la supervision directe du Président de la République.

3. La convergence de vue quant à l’impératif de poursuive les efforts d’harmonisation des engagements politiques jadis entrepris séparément sous l’égide des garants et facilitateurs de l’Accord du 6 février, et dans le cadre de la Feuille de Route Conjointe qui devraient maintenant s’inscrire en toute synergie dans une plateforme unique qui réunira en son sein les mandataires de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs, l’Angola et le Rwanda, l’Union Africaine, la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale et la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation en République Centrafricaine (MINUSCA).

4. La création des conditions indispensables au réengagement des partenaires internationaux qui partagent tous, avec le Gouvernement, une convergence de vue quant à l’unicité du processus politique articulé autour de l’Accord Politique pour la paix et la Réconciliation que la Feuille de Route Conjointe cherche à revitaliser autour des six composantes clefs qui en constituent les leviers.

5. Et la décision souveraine des autorités centrafricaines d’instituer cette plateforme permanente de revue stratégique du processus politique qui sera convoquée tous les trois mois à compter du 4 juin.

Distingués membres du Conseil,

6. Au regard des développements encourageants dans les efforts collectifs de redynamisation du processus politique par un renouveau de la dynamique régionale, le soutien unanime de tous les membres du Conseil à l’exécution du plan de suivi de la revue stratégique du 4 juin. C’est le lieu de relever, pour s’en féliciter, la décision prise par le Président de la République, en Conseil des ministres, de s’impliquer directement dans les engagements politiques avec les leaders de groupes armés et de conduire les revues stratégiques inclusives et sectorielles du processus Désarmement, Démobilisation, Réintégration et Rapatriement, de la Réforme du Secteur de la Sécurité et de la Réconciliation dans le cadre des commissions thématiques qui seront établies à cet effet autour des 6 composantes de la Feuille de Route Conjointe.

7. Toutefois, l’espoir de la réanimation du processus de paix nourri par toutes les parties prenantes à la revue stratégique du 4 juin, n’en cache pas moins leur vœux ardent de voir le Gouvernement mettre en œuvre les 217 recommandations du Dialogue républicain afin de promouvoir l’élargissement de l’espace démocratique et un climat politique. Par conséquent j’encourage le Gouvernement à accélérer l’appropriation et la mise en œuvre des recommandations du Dialogue républicain qui relève de la sixième composante de la Feuille de Route Conjointe pour la Paix en République Centrafricaine relative au processus politique. J’entends continuer à soutenir les efforts du Gouvernement dans ce sens, en appelle aux partenaires pour leur contribution et sollicite le soutien politique de ce Conseil de sécurité conformément aux dispositions de la Résolution 2605 qui nous demande d’assister les autorités centrafricaines à mener à bien un Dialogue républicain pleinement inclusif en prélude d’élections locales pacifiques et inclusives.

8. Qu’il me soit enfin permis de relayer la préoccupation largement partagée par tous sur la persistance des violations du Cessez-le-feu par toutes les parties au conflit qui poursuivent leurs opérations et actes de belligérances qui exposent les populations civiles à la violence. La cessation des hostilités sur toute l’étendue du territoire centrafricain reste à la fois un objectif immédiat et un gage de crédibilité de la Feuille de Route Conjointe pour la Paix en République Centrafricaine. Elle doit retenir notre attention et susciter l’adoption de mesures consensuelles dissuasives contre les parties qui ne respectent pas leurs engagements en vertu de la Feuille de Route Conjointe conformément à la lettre et à l’esprit de l’Accord de paix et ce, sans préjudice de la restauration en cours de l’autorité de l’État et à l’exercice de ses pouvoirs régaliens de protection de l’intégrité territoriale.

Madame le Président,

Distingués membres du Conseil,

9. Les craintes légitimement nourries par les populations civiles qui subissent encore les méfaits de la persistance des violations du Cessez-le-feu avec des menaces plus accrues sur leurs vies, propriétés et activités spécifiquement dans les parties nord et centre ainsi que l’est de la République Centrafricaine continuent d’être rapportées. Tirant les conséquences de ces agissements préjudiciables à la sécurité des personnes et des biens et à l’assistance humanitaire et prenant l’exacte mesure des progrès encore fragiles dans la reconstruction des Forces de Défense et de Sécurité nationales et compte tenu de notre mandat et des moyens additionnels que ce Conseil a bien voulu nous apporter, la MINUSCA a réajusté son concept d’opérations, privilégiant une approche préventive, centrée sur les populations civiles qui méritent, vous en conviendrez, de vivre dans la paix, dans la sécurité et sans être dans la peur quel que soit le lieu où elles vivent sur l’étendue du vaste territoire centrafricain.

10. Je me réjouis que ce réajustement de notre concept d’opérations ait été décisif par son impact positif sur les populations de Boyo, Mingala et Pouloubou qui ont exprimé leur satisfaction sur la posture robuste et proactive de la MINUSCA, en coopération avec les Forces nationales de Défense et de Sécurité. J’entends poursuivre et continuer de mobiliser toutes les ressources de la MINUSCA et travailler avec les autorités des communautés locales ainsi que les populations et les leaders des communautés locales afin de prendre ce type de mesure préventive requise, en appui aux autorités centrafricaines, afin d’enrayer les menaces crédibles de violence sur les populations civiles, plutôt que de réagir quand les violences ont déjà eu lieu.

11. Telle est la teneur de l’objectif à atteindre en parfaite coordination avec les Forces de Défense et de Sécurité que nous continuerons de soutenir dans le respect de la politique de due diligence en matière de droits de l’Homme comme nous l’exige le mandat à nous assigné par ce Conseil. L’effectivité d’une telle posture de la MINUSCA est d’autant plus nécessaire qu’elle conditionne, au-delà de la protection des civils et de l’accès à l’aide humanitaire, la création et le maintien d’un environnement sécuritaire propice au déroulement du processus de paix y compris le respect du Cessez-le-feu, la restauration intégrale de l’autorité et des services de l’État, à la poursuite du DDRR dans un climat de confiance et à la mise en œuvre de solutions durables pour le retour volontaire et en toute dignité de réfugiés et personnes déplacées en vue de leur participation aux élections locales afin qu’elles soient crédibles pacifiques mais aussi inclusives dans toutes les collectivités territoriales de la République centrafricaine.

12. Dans ce sillage et malgré la crise du carburant qui nous affecte, la MINUSCA planifie, pour exécution immédiate, des opérations en réponse à la nouvelle posture des groupes armés qui profitent du contexte de crise pour un repositionnement tactique. À cet égard, j’en appelle aux membres du Conseil à mobiliser tous les États membres afin de garantir l’approvisionnement en carburant, qu’ils en soient la source ou transit, de la MINUSCA pour la continuité de la plénitude de nos opérations qui restent indispensables à la sécurité et la stabilité de la République Centrafricaine.

13. Pour rester consistante, la MINUSCA ambitionne de maintenir cette posture et d’accroître son soutien et sa coopération avec le Gouvernement. Nous restons cependant conscients que la solution à terme aux problèmes de sécurité de la Centrafrique réside dans la reconstruction des capacités requises pour des Forces de Défense et de Sécurité encore plus professionnelles et efficientes, gage de durabilité des efforts de sécurisation et de stabilisation de la République Centrafricaine. Il s’agit d’une œuvre collective qui requiert le soutien du Conseil de sécurité et l’appui de tous les partenaires, ainsi que la création par le Gouvernement, de conditions favorables au réengagement concerté et coordonné de tous ses partenaires, bilatéraux et multilatéraux, dans le processus de mise en œuvre de la stratégie nationale de Réforme du Secteur de la Sécurité y compris le plan national de défense.

14. À cet égard, la MINUSCA maintient un dialogue constructif et franc avec le Gouvernement pour le respect des droits de l’Homme. Les rapports compilés et finalisés par la MINUSCA feront l’objet d’une publication après consultation avec le Gouvernement conformément à la procédure en vigueur. Nous restons déterminés à travailler avec le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Droits de l’Homme pour assister le Gouvernement dans l’adoption de mesures préventives et la mobilisation d’une assistance technique appropriée ainsi que dans les efforts de lutte contre l’impunité et de réhabilitation de victimes de violations des droits de l’homme.

15. Dans le même sillage, la MINUSCA relève avec la même préoccupation, la persistance de la stigmatisation et l’incitation publique à la violence contre des leaders de l’opposition démocratique ou à l’égard de certains partenaires de la République centrafricaine. L’histoire et le passé récent en République centrafricaine comme dans la région par ailleurs démontrent que ce type de message peut rapidement se traduire en actes de violence aux conséquences imprévisibles et incontrôlables. Ils sont aussi de nature à saper le vivre ensemble, fragiliser le processus de réconciliation nationale et freiner les efforts entrepris. Par conséquent, il relève de la responsabilité du Gouvernement d’y apporter une réponse appropriée en prenant toute mesure utile afin de prévenir, de réprimer et de faire cesser de tels actes qui sont repréhensibles.

Madame le Président,

Distingués membres du Conseil,

16. J’aimerais conclure en me réjouissant du renforcement des mesures de confiance entre la MINUSCA et le Gouvernement centrafricain qui ont permis de réduire les violations du SOFA, le renforcement de notre coopération et d’insuffler un nouvel élan au processus de paix. Ce sera uniquement avec une telle confiance que la MINUSCA comme la République centrafricaine pourraient davantage bénéficier de la plénitude du mandat multidimensionnel de la MINUSCA à travers son effectivité opérationnelle au service de la paix, de la sécurité et de la stabilité vers des solutions politiques durables à la crise centrafricaine.

Je vous remercie de votre aimable attention.
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