Le leader du Front démocratique du peuple centrafricain, le général Abdoulaye Miskine, l’un des signataires de l’Accord de Khartoum du 6 février 2019, arrêté et incarcéré dans une prison à Ndjamena au mois d’octobre 2019, serait gravement malade et privé d’avoir accès à un médecin et de bénéficier des soins médicaux.
En flagrante violation des droits de l’homme, le droit à la santé reconnu à tout prisonnier, tout détenu et tout condamné, dans un pays qui se dit démocratique comme la République du Tchad, sa situation se dégrade du jour au jour, et le pire est à craindre, selon des informations de sources policières et militaires en notre possession. Une situation qui risque de ternir l’image du Tchad dans le concert des nations, au cas où ce pire devrait arriver, après l’arrestation et le transfèrement de l’un des leaders des Anti- Balaka, l’ancien ministre Maxime Mokom, à la CPI.
Pour rappel, selon la DW du 4 juin 2020, « le leader du Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC), Abdoulaye Miskine, de son vrai nom Martin Koumtamadji, et trois de ses compagnons, avaient été interpellés à l’est du Tchad et conduit à N’Djamena en octobre 2019. A l’époque, Bangui avait dépêché à Ndjamena le ministre centrafricain de la Justice, Flavien Mbatta, en vue de négocier l’extradition de ces rebelles. Mais, le Tchad avait refusé. Huit mois après, la justice tchadienne décide finalement d’ouvrir une information judiciaire contre ces rebelles centrafricains.
Que leur reproche-t-on concrètement ? Pour Maître Mognan Kembetiade, un des avocats des prévenus, ‘’On reproche à Abdoulaye Miskine et aux trois autres, l’infraction d’organisation de mouvement insurrectionnel et de viol, en 2004. Les conseils se réservent pour l’instant le droit de présenter les moyens de défense qui permettront aux juges de rendre une ordonnance digne de ce nom. Il n’a pas été précisé s’il s’agit de viol commis sur le territoire tchadien ou en territoire centrafricain. Parce que nous n’avons vu aucune plainte annexée au procès-verbal d’enquête préliminaire. Dès l’instant où une information judiciaire est ouverte et le juge d’instruction saisi de l’affaire, je pense qu’on ne peut plus parler d’extradition‘’, explique l’avocat.
Abdoulaye Miskine comme moyen de pression
Selon le juriste politologue Sitack Yombatina Beni, deux hypothèses justifieraient le refus des autorités tchadiennes d’extrader ces rebelles en Centrafrique :
« La première hypothèse plausible qu’on pourrait émettre est que le Tchad refuse qu’Abdoulaye Miskine puisse se retrouver de l’autre côté et fasse un certain nombre de confessions. La deuxième hypothèse qu’on peut émettre également, vue la tension entre la république centrafricaine et le Tchad, est que le Tchad garderait Abdoulaye Miskine et sa suite comme moyen de pression pour permettre de dénouer les relations entre les deux pays. Il aurait été plus facile de les renvoyer en Centrafrique et puis le Tchad pourrait aussi se constituer partie civile. Parce qu’Abdoulaye Miskine n’est pas seulement réclamé par la Centrafrique mais aussi par la Cour pénale internationale (CPI). «
Relations difficiles
Un avis que partage bon nombre de défenseurs tchadiens des droits humains, comme Sosthène Mbernodji, le Coordonnateur du mouvement citoyen pour la préservation des libertés, le MCPL. « Il faut que le Tchad arrête de s’impliquer dans les affaires centrafricaines. Abdoulaye Miskine doit être extradé en Centrafrique puisqu’il est centrafricain. On n’a pas assez de garantie pour que Miskine soit jugé et purge sa peine ici », estime Sosthène Mbernodji. La DW a tenté sans succès, d’avoir l’avis des autorités judiciaires tchadiennes sur le sujet.
En 2003 et 2014, la République centrafricaine avait accusé le Tchad de soutenir des rebellions contre les différents pouvoirs qui se sont succédés en Centrafrique. Des accusations qui continuent jusque-là d’empoisonner les relations diplomatiques entre Bangui et N’Djamena ».
Aux dernières nouvelles, les faits qui lui ont été reprochés, se seraient fondus comme du beurre au soleil, du fait que pendant la période où ils se seraient déroulés, le général Abdoulaye Miskine serait en exil à Tripoli en Libye. Du coup, l’homme croupirait en prison par le seul fait du Prince.