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Centrafrique : ce qui s’était passé à Boyo dans la Ouaka du 6 au 13 décembre 2021, selon le Haut – Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme

Publié le mercredi 27 juillet 2022  |  Le Tsunami
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© Autre presse par DR
Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme
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Résultats de l’enquête sur le déroulement de l’attaque

16. Le 6 décembre 2021, à l’aube, environ 240 assaillants selon des sources concordantes,
essentiellement des hommes mais parmi eux, a tout le moins, huit femmes sont entrées dans le village de Boyo, sous le commandement du « Général » anti-Balaka Edmond. Ils ont été décrits par les témoins comme portant essentiellement des tenues civils et armés de fusils de fabrication artisanale, de Kalachnikovs et des grenades, mais pour l’essentiel d’armes blanches telles que des machettes20. Au même moment, les habitants ont entendu les premiers tirs d’armes à feu, tirs dont une balle perdue a atteint mortellement une fille de 12 ans.

17. Entre 6h et 6h30, les assaillants ont contraint des hommes, musulmans, de Boyo de se
regrouper sur le lieu du marché, épargnant les chrétiens, sous la menace de leurs armes dont des machettes, des armes traditionnelles, des kalachnikovs et des grenades. À cet endroit, ils ont exigé que chacun présente une pièce d’identité et paie une somme allant de 3.000 à 5.000 Francs CFA pour être libéré. Les assaillants ont saisi également plusieurs motocyclettes et exigé, des montants variants entre 10.000 et 40.000 Francs CFA pour chaque individu qui voulait récupérer sa motocyclette.

18. Le même jour, vers 18h30, trois leaders anti-Balaka sous le commandement de
Edmond21 ont envoyé un de leurs éléments pour convoquer le Maire intérimaire de Boyo et
deux autres membres de la communauté musulmane. À l’arrivée de ces trois représentants, les chefs anti-Balaka ont accusé les habitants musulmans de Boyo d’être des rebelles et ont menacé de les tuer tous au premier tir des rebelles de l’UPC. Les trois chefs anti-balaka ont déclaré avoir été envoyés par le gouvernement pour chasser les rebelles de l’UPC et qu’ils prévoyaient de rester un mois sur place.

19. Le 7 décembre 2021, vers 5h du matin, des éléments armés identifiés comme des
combattants de l’UPC ont tenté de contre-attaquer à l’arme à feu mais ont été mis en déroute par les assaillants, beaucoup plus nombreux. À la suite de cette tentative d’incursion, les assaillants ont incendié des maisons, ciblant spécifiquement des habitations appartenant à des musulmans. Si, par erreur, des maisons d’habitants chrétiens étaient incendiées, ils éteignaient eux-mêmes le feu. Vers 7h du matin, les assaillants ont alors regroupé des hommes, des femmes et des enfants musulmans, à l’intérieur et aux abords de la mosquée, soit entre 700 et 800 personnes selon les témoignages concordants. Edmond, un des leaders anti-Balaka, a pris en main une grenade, en menaçant de tuer tous les villageois regroupés dans la mosquée. Le Maire intérimaire de Boyo s’était agenouillé devant lui, brandissant le drapeau national de la RCA, pour le supplier pendant 30 minutes avant qu’il ne renonce à mettre sa menace à exécution. Les femmes et les filles musulmanes ont été libérées dans la même matinée et se sont regroupées dans quelques maisons pour être en sécurité.

20. Le 7 décembre, entre 7h30 et 16h00, les assaillants ont exécuté 17 membres de la
communauté musulmane, tous des hommes, à différents endroits du village de Boyo. La
majorité de ces 17 personnes a été décapitée ou égorgée à l’aide de machettes. La tête d’une de ces 17 victimes a été exposée devant la mosquée alors que ses organes génitaux étaient exposés au marché du village. Les corps des victimes ont été ramassés et inhumés par les membres de la communauté chrétienne du village souvent sous la supervision des assaillants. Tel fut le cas pour 14 d’entre elles enterrées dans une fosse commune au cimetière musulman. Selon plusieurs témoins, certaines victimes auraient été enterrées vivantes, après être grièvement blessées à la machette. Les premiers blessés à la machette ont aussi été enregistrés au cours de la même période, une des victimes, un homme, a été interrogée dès 5h du matin le 7 décembre 2021, par les assaillants qui l’ont accusée d’être un général Séléka. Vers 16h, cette victime a été décapitée par une femme âgée de 30 ans (originaire de Seko) désignée comme étant l’aide de camp du leader anti-Balaka Edmond. Sa tête a été portée à travers Boyo par les assaillants. Un autre homme a été égorgé dans la soirée entre 16h et 17h et enterré à moins de 5 mètres de son lieu d’exécution.

21. Le 8 décembre 2021, vers 13h, les assaillants sont partis de Boyo à la recherche de
deux frères musulmans dans leur village à Komayé situé à 12 km de Boyo sur l’axe Tagbara. Ils les ont trouvés, les ont blessés à coups de machettes et ont exigé une rançon de 5 millions de Francs CFA contre la libération de leur père qui était séquestré à la mosquée de Boyo. Les assaillants demandaient une rançon élevée au motif que le père des deux frères possédait 20 têtes de bœuf.

22. Dans la nuit du 8 au 9 décembre 2021, pendant que les villageois étaient séquestrés
dans la mosquée de Boyo, des groupes de deux à quatre assaillants sont entrés dans les
maisons des musulmans, forçant les portes, pour piller les biens. Plusieurs civils ont été
frappés, blessés et menacés avec des armes. Des femmes et filles musulmanes ont été violées à leurs domiciles ou amenées ailleurs puis violées sans la présence d’autres civils. Plusieurs cas de violences sexuelles ont été rapportés dont cinq ont été confirmés par l’enquête et alors que sept autres n’ont pu été confirmés.

23. Le 9 décembre 2021, un chef anti-Balaka22 est venu de Bambari et a demandé aux
victimes séquestrées à la mosquée un paiement de 5 millions de Francs CFA pour la libération de tous ces musulmans. La somme de 2,8 millions de FCFA a été collectée auprès des membres de familles des personnes séquestrées et remis aux assaillants. C’est par la suite qu’ils ont été libérés le même jour.

24. Le 10 décembre 2021, vers 23h, à Tagbara, quatre assaillants armés circulant à vive allure sur quatre motocyclettes ont ouvert le feu sur une patrouille de la Force de la MINUSCA. La patrouille, en ripostant, a mis les agresseurs en fuite, lesquels ont abandonné les quatre motocyclettes utilisées.

Par mesure de sécurité, ces motocyclettes ont été conservées dans la base opérationnelle temporaire (BOT) de la Force à Tagbara. Le lendemain, 11 décembre 2021, le commandant FACA en poste à Maloum envoyait un courrier manuscrit demandant la remise des motocyclettes aux porteurs. Plusieurs témoignages des victimes et témoins y compris celui d’un des leaders des miliciens armés qui ont attaqué Boyo ont confirmé que certaines motocyclettes saisies par la MINUSCA
avaient été pillées dans le village de Boyo. Le 13 décembre 2021, les assaillants ont fui le village, avant l’arrivée de la Force de la MINUSCA qui se dirigeait vers Boyo. Ils se sont relocalisés dans plusieurs villages environnant Boyo, notamment à Atongo-Bakari, situé à 17km de Boyo et difficile d’accès en raison d’un pont endommagé.
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