Le BRDC vous a conviés aujourd’hui pour faire le bilan de l’année qui s’achève.
Annus horribilis par excellence pour les démocrates et la démocratie, elle l’a été également pour nos compatriotes sur toute l’étendue du territoire, massacrés quotidiennement aussi bien par les groupes armés que les supplétifs du pouvoir sanguinaire de Bangui.
Ces massacres quasi quotidiens sont devenus des faits divers pour les gouvernants qui n’ont aucun mot de compassion à l’endroit de ces compatriotes, à défaut de les protéger, occupés qu’ils sont à jouir de leur pouvoir.
L’année 2023 a été marquée par la mise à mort de la démocratie dans notre pays. Le Président TOUADERA a décidé d’assumer son statut de dictateur de manière décomplexée en ôtant aux institutions de l’Etat jusqu’à leur apparence d’indépendance.
Ainsi, malgré la décision réputée irrévocable et applicable à tous de la Cour Constitutionnelle, il a opéré un passage en force et a dévidé cette institution de tous ses éléments intègres, ouvrant la voie à un referendum constitutionnel déclaré illégal par cette même Cour Constitutionnelle. Tout cela, dans un silence complice de la communauté internationale.
Et, dans une imitation jusqu’à la caricature des dictatures des années de braise du siècle dernier, toutes les institutions de la République font désormais allégeance : la Cour Constitutionnelle, le Haut Conseil de la Communication, l’Autorité Nationale des Elections etc…
Quant à la justice, elle n’est plus rendue au nom du Peuple, mais contre le Peuple, celui qui condamne la dictature, celui qui refuse de se soumettre. C’est ainsi qu’à l’image des procès de l’époque stalinienne connus sous le nom des purges de Moscou, des démocrates, dont le tort est de travailler à la restauration de la démocratie, ont été condamnés en violation des règles élémentaires des droits de la défense. Il s’agit des Professeurs Gaston MANDATA NGUEREKATA et Jean-François AKANDJI-KOMBE, de Rodrygue Prudence MAYTHE, de Serge MBAIKASSI TONZERATOU et de bien d’autres..
D’autres procès sont prévus, notamment contre Abdou Karim MECKASSOUA, Président du Chemin de l’Espérance, membre du BRDC.
Récemment encore, le député du 4è arrondissement de la ville de Bangui, Dominique YANDOCKA, a été arrêté en sa résidence, au mépris de l’immunité que lui confère son statut de député et en dehors des heures légales. Les arguties brandies par le Parquet pour justifier cet acte barbare étant ce qu’elles sont, c’est-à-dire des arguties, nous demandons sa libération immédiate et sans conditions. D’autres menaces pèsent sur la vie des démocrates. Des appels au meurtre sont lancés chaque jour par voie de presse, par des ministres contre les leaders de l’opposition. Un appel au génocide a même été lancé par un ministre d’Etat.
Certains leaders sont traqués, au point de choisir le chemin de l’exil, comme c’est le cas pour Alexandre Ferdinand NGUENDET. Le même acharnement peut être constaté à l’encontre Martin ZIGUELE et Anicet Georges DOLOGUELE, respectivement Présidents du MLPC et de l’URCA, membres du BRDC, dont une partie des indemnités a été retenue, accompagnée des velléités de levée de leur immunité parlementaire.
Quant aux actes d’intimidation, ils sont nombreux, je n’en citerai qu’un seul : le survol par drones du domicile de Maître Crépin MBOLI-GOUMBA, après ceux de Maître Nicolas TIANGAYE et de Martin ZIGUELE.
Il y a quelques jours, des éléments de Wagner ont tenté de faire irruption au domicile du Coordonnateur du BRDC. Nous rappelons que ce n’est pas la première fois que le Coordonnateur du BRDC est victime des tentatives d’atteinte à son intégrité physique des éléments de WAGNER. En effet, ils avaient déjà fait irruption au restaurant, au vu de tout le monde, de même qu’aux alentours de sa résidence en repérage, ils l’ont pris en chasse plusieurs fois.
Comme vous pouvez le voir, le bilan de cette année qui s’achève est sombre.
A l’évidence, le dictateur de Bangui n’a pas les moyens de sa dictature, ni politiques, ni diplomatiques, ni militaires, ni financiers.
Sur le plan politique, la décision de l’opposition démocratique de ne pas se faire harakiri en accompagnant un processus électoral inique qui aurait permis de conférer des apparences démocratiques à la dictature a permis au monde entier de prendre conscience de la mascarade.
La promulgation d’une nouvelle Constitution à la suite d’un referendum jugé illégal par la Cour Constitutionnelle et dont la crédibilité et le taux de participation ont été décriés par des pays comme les Etats-Unis d’Amérique, achève de convaincre même les plus sceptiques que désormais, en terre Centrafricaine, la démocratie a vécu.
Dans ce désordre, même le parti au pouvoir le MCU, dont le dénominateur commun à tous les membres est la jouissance des avantages du pouvoir et non le service public, se trouve empêtré dans des luttes de positionnement.
Sur le plan diplomatique, l’Etat Centrafricain donne l’impression d’être atteint de la danse de Saint-Guy : un jour, clamant sa souveraineté et son amour pour Moscou et Wagner, un autre pleurant pour bénéficier du soutien du Monde Occidental. On a ainsi vu le Président quémander quelques minutes au Président Français à Libreville, avant de se voir imposer par Wagner un discours anti occidental quelques jours plus tard à Dubaï et à la Havane, pour aussitôt se faire recevoir à l’Elysée, savourant ce moment comme un triomphe, ce qui fait désordre pour un « souverainiste ».
La cacophonie de ces derniers jours, consécutive à l’arrivée du groupe de sécurité privée américain confirme le diagnostic de la danse de Saint-Guy. En effet, alors que madame le ministre des Affaires Etrangères protestait contre le projet d’installation en Centrafrique de ce groupe, le porte-parole de la Présidence a contredit cette dernière et confirmé la présence de ce groupe à Bangui.
Sur le plan militaire, presque huit ans après l’arrivée au pouvoir du Président TOUADERA, une armée digne de ce nom, capable de défendre toute l’intégrité territoriale, n’a pas été mise sur pied. Nous sommes militairement sous-tutelle du groupe Wagner, de l’armée Rwandaise, de la MINUSCA et désormais de BANCROFT. La « PAX WAGNERA » est une illusion sanglante qui donne l’impression que le territoire national est sous-contrôle. A la vérité, elle cause à l’Etat des milliards de dollars en pillages des ressources naturelles (or, diamants, bois, etc.) et en vies humaines, sans oublier des pans entiers du territoire national perdus au profit des pays voisins.
Sur le plan financier, la situation est catastrophique.
Les entreprises pourvoyeuses de taxes et impôts, n’ont pas cessé de mettre la clé sous le paillasson, harcelées qu’elles sont dans un environnement où la sécurité juridique et judiciaire nécessaire aux investissements n’est plus à l’ordre du jour.
Il en résulte que les caisses de l’Etat sont désespérément vides, contrairement aux promesses de la 7è République de la prospérité pour tous et d’un Etat puissant.
Les Centrafricains n’ont jamais été aussi pauvres. Leur quotidien se résume à avaler de la poussière causée par le décapage des résidus de bitume par des sociétés proches du pouvoir bénéficiant des marchés de gré à gré pour saupoudrer les chaussées dont la durée de vie est d’une saison.
Mesdames et Messieurs,
C’est dans ce contexte que s’annonce l’année 2024.
Face à la gravité de la situation, l’opposition démocratique réaffirme son rejet du pseudo-référendum du 30 juillet 2023 et ne reconnait pas cette Constitution initiée illégalement. Seule la Constitution du 30 mars 2016 demeure la Loi Fondamentale issue de la volonté librement exprimée des Centrafricaines et des Centrafricains.
Elle confirme sa non-participation aux élections locales prévues en 2024 sous le régime d’une Constitution illégale et des institutions aux ordres.
Elle rejette tout dialogue avec le Président Faustin-Archange TOUADERA, seul responsable de cette situation, et condamne le silence complice de la communauté internationale.
Enfin, elle appelle le Peuple Centrafricain à rester mobilisé, malgré les intimidations, les provocations et les humiliations, pour intensifier la lutte pour la démocratie.