Mardi et mercredi, l’ancien coordinateur du mouvement Anti-Balaka a été devant les juges de la Cour pénale internationale. Ceci dans le cadre de sa « déclaration non assermentée ». Cette audience prévue par le Statut de Rome, a permis à l’accusé de tenter de convaincre la Cour après son audience de confirmation des charges. Retransmise en direct à Bangui, cette étape du procès a été largement suivie par ses proches ainsi que des représentants des victimes.
Costume bleu pendant la première journée, assis dans un fauteuil, entouré de ses avocats, Patrice-Edouard Ngaïssona s’est montré serein dans sa présentation des faits. Dans ses propos, il met en avant sa contribution pour la paix aux côtés des gouvernements successifs de la transition sous le leadership de Catherine Samba Panza, présidente de la transition entre 2014 et 2016.
L’homme explique que son choix pour la paix lui a permis de prendre part au forum de Brazzaville. Un choix qui, selon lui, diffère de la ligne choisie par les radicaux tels que général Andjilo et bien d’autres qui n’étaient pas sur la même trajectoire d’apaisement.
Il cite plusieurs noms parmi lesquels celui de Jean-Jacques Demafouth, ministre conseiller à la présidence qui, selon ses propres mots, voulait obtenir sa tête à tout prix. Pour matérialiser ses éléments à décharge, Patrice-Edouard Ngaïssona brandit plusieurs conversations avec les autorités politiques, administratives et militaires de l’époque entre autres avec le général camerounais Martin Tumenta, de la force de l’Onu.
Alors que l’audience est prévue en une journée, en raison d’un malaise de Patrice-Edouard Ngaïssona, la Cour prolonge la déclaration non-assermentée de l’accusé au lendemain.
L’ancien coordinateur des Anti-Balaka revient le mercredi avec plus d’arguments, se montre un bâtisseur de la paix et demande son acquittement. Pour lui, il n’a pas été compris par le gouvernement de transition. « C’est au gouvernement de transition de prendre ses responsabilités pour faire revenir la paix. J’ai fait ce que j’ai pu faire afin que le gouvernement me suive pour la paix. Si le gouvernement m’aidait dans la recherche de la paix sans préjugé de mon ethnie et de vouloir me coller à Bozizé, déjà au mois de février- avril, on aurait fini par parvenir à une réconciliation et à vite retrouver la paix. J’ai persévéré jusqu’aux élections de 2015-2016. L’idée que j’ai tenté de profiter de la crise est un mirage, car il n’y a aucune preuve que j’ai profité des Anti-Balaka. Au contraire, j’ai beaucoup sacrifié pour le retour de la paix », déclare-t-il.
Pour finir sa déclaration, Patrice-Edouard Ngaïssona a présenté un programme politique axée sur la paix et la justice s’il est acquitté. Lequel programme rime bien avec l’idéologie de son parti le PCUD, selon Samson Ngaïbona, Secrétaire général dudit parti politique.
L’absence de Ngaïssona représente un vide insurmontable au sein de sa famille. Jeanne Silas Béoroféï, sa tante maternelle, trouve en son plaidoyer, une raison de satisfaction et espère une justice juste pouvant permettre à son neveu de retrouver les siens.
« Hier, quand j’ai suivi sa déclaration, à mon retour, j’ai trouvé la force mais pas totalement. Parce qu’il n’est pas là. Je souffre au niveau des jambes et c’est lui qui assure le coût de la prise en charge. Aujourd’hui, il n’est pas là et c’est bien dommage. Il n’y a rien qui dépasse Dieu. Nous avons les yeux tournés vers la justice pour une décision juste afin qu’il rentre. Ce sera une grande joie dans la famille ».
Arrêté le 12 décembre 2018 puis transféré à la CPI, Patrice-Edouard Ngaïssona est poursuivi pour des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis entre décembre 2013 et décembre 2014 en République centrafricaine, en sa qualité de coordinateur des Anti-Balaka, milice qui a lancé des hostilités contre la rébellion de la Séléka qui venait de prendre le pouvoir entre les mains de François Bozizé.