Lancé en novembre 2011, le marché régional des titres publics de la CEMAC a battu un nouveau record en franchissant la barre des 7 000 milliards FCFA (environ 12 milliards de dollars) d'encours de dettes à fin juillet 2024. L'information a été dévoilée à l'occasion de la 11e conférence du cadre permanent de concertation des trésors publics (CPC-TP-CEMAC) qui s'est tenu cette semaine à Brazzaville, la capitale du Congo. Le portefeuille des emprunts sur ce marché connaît ainsi une progression de près de 600 milliards FCFA en 5 mois, drivé par une forte demande des États de la région.
En début d'année, le Cameroun, le Tchad, le Congo, la RCA, le Gabon et la Guinée Équatoriale ont ensemble indiqué qu'ils envisageaient de mobiliser un peu plus de 3 327 milliards FCFA (environ 5,4 milliards USD) en 2024 pour financer leurs besoins de trésorerie. Des prévisions que certains ont dû revoir à la baisse à cause des conditions d'emprunts devenues rigides dans le sillage du resserrement de la politique monétaire par la Banque centrale. C'est le cas du Cameroun, leader économique de la région. En juin dernier, l'Assemblée nationale a adopté une loi de finances rectificative qui réduit de 25% l'objectif de mobilisation sur le marché domestique.
Le marché sous tension
Même si la BEAC a assoupli sa politique monétaire, la capacité du marché des titres publics à couvrir les besoins financiers des États de la région est de plus en plus faible. La raison ? Les fonds mobilisés sont essentiellement alloués par les banques commerciales qui concentrent plus de 75% de l'encours. Ce qui réduit leurs capacités d'intervention sur les nouveaux emprunts au vu des contraintes prudentielles visant à limiter leur exposition au risque souverain.
Une des solutions serait de dynamiser le marché secondaire, celui auquel ont accès les particuliers, afin d'alléger le portefeuille des établissements de crédit. Pour l'instant, le grand public pèse moins de 3% du portefeuille des dettes étatiques. Cette option a été mise sur la table lors de la rencontre du CPC-TP-CEMAC, mais les actions visant à intéresser le grand public n'ont pas été dévoilées.
L'autre inquiétude qui s'est emparée du marché et qui a été évoquée lors de la rencontre de Brazzaville, c'est la capacité des États à honorer les échéances de remboursement. Réputé solvable, le marché des titres publics a officiellement enregistré il y'a quelques jours son premier défaut de paiement depuis 2011. La BEAC a fustigé l'opacité de certains émetteurs et la faible gestion de la dette. "Un autre défi concerne la rationalisation des interventions de l'État, les sorties longues que prévues, la déconnexion avec les calendriers, les dépenses extrabudgétaires, les plans de trésorerie qui ne sont que des papiers dans les tiroirs, tout ça ne contribue pas à rassurer les investisseurs ", a indiqué Christian Rodrigue Otoly, en charge de la Cellule de règlement et de conservation des titres à la Banque centrale.
Il a ainsi été préconisé la mise en place d'une charte de bonne conduite qui devrait être adoptée lors de la prochaine rencontre des Trésors de la CEMAC en décembre.
Cédrick JIONGO
La Rédaction