Le député Dominique Yandocka, accusé d'"atteinte à la sureté de l'Etat", et arrêté en décembre 2023, malgré son immunité parlementaire a comparu mardi devant la cour d'appel de Bangui, a rapporté une journaliste de l'AFP.
Lors de l'audience, l'accusation n'avait toujours pas fourni les enregistrements audio démontrant l'implication de M. Yandocka, franco-centrafricain et figure du parti d'opposition Initiative pour la transformation par l'action (ITA) dans une "tentative de coup d'Etat" pour laquelle il risque les travaux forcés à vie.
"Le procès n'est pas équitable. On ne nous parle que d'une conversation qui a été enregistrée (par des) moyens frauduleux", a dit à l'AFP Arlette Sombo Dimbelet, avocate de la défense.
"Plusieurs fois notre client a demandé une confrontation avec ses détracteurs" sans qu'elle n'ait eu lieu, a-t-elle poursuivi.
Les trois témoins qui ont fourni ces preuves n'étaient pas présents lors des débats.
"Les membres de l'Assemblée nationale jouissent de l'immunité parlementaire. Aucun député ne peut être poursuivi, détenu ou jugé en matière correctionnelle ou criminelle. Nous estimons que votre juridiction n'est pas compétente pour le faire", a tenté de contester Me Albert Panda, l'avocat de la défense.
Le président de la Cour Thierry Joachim Pessiré a rejeté la requête et "ordonné l'ouverture des débats au fond" invoquant le non respect du délai de 48 heures pour interjeter appel.
Le parlementaire, afaibli par des problèmes cardiaques selon ses avocats et se déplaçant en béquilles a dénoncé des poursuites politiques.
Le procès suspendu mardi après-midi doit reprendre jeudi.
Une figure de l'opposition en Centrafrique, Crépin Mboli Goumba, a été condamnée en mars à un an de prison avec sursis pour difamation et outrage à magistrats, dans un pays où toute voix dissonante est réprimée par le pouvoir du président Faustin Archange Touadéra.
Le régime de M. Touadéra "réprime la société civile, les médias et les partis politiques d'opposition", écrivait Human Rights Watch (HRW) en avril 2023. L'ONG exhortait aussi le pouvoir de M. Touadéra à "garantir l'indépendance de la justice pour s'assurer que les responsables qui attaquent les détracteurs du gouvernement soient amenés à rendre des comptes".
M. Touadéra a fait modifier la Constitution en juillet 2023 par un référendum boycotté par l'opposition, pour s'autoriser à briguer un troisième mandat en 2025.
Elu en 2016 en pleine guerre civile, il avait été réélu en 2020 dans des conditions contestées par l'opposition et dans un pays dont une grande majorité du territoire était contrôlée par des rebelles, que son armée a ensuite repoussés grâce à l'aide de Moscou et l'intervention massive de mercenaires russes de Wagner.